Rinse 19
Icicle
Causer de ce dix-neuvième volet de la série Rinse va vite revenir à gloser sur deux des plus grandes institutions de la culture de la basse d’outre-manche. D’un côté, on tient ce qui restera comme l’une des plus grandes fréquences radio anglaise : Rinse et ses dix-huit ans d’activisme forcené, cette structure qui, des semaines durant, a pilonné vingt-deux heures sur vingt-quatre toutes les nouveautés des scènes drum’n’bass, hardcore, grime, garage et dubstep. Une chaîne qui ne se conçoit qu’à travers un flot ininterrompu (si, deux heures par jour) de sélections en tous genres, mixées autant par des résidents enfumés que des stars de la uk bass music. Une sorte de temple des musiques urbaines, qui vient d’ailleurs de sortir de l’illégalité en obtenant sa licence officielle seize ans après sa création, et où se croisent toutes les influences, tous les genres pourvu qu’ils parlent directement aux tripes. L’autre institution à côté de laquelle on ne peut pas passer dans cette chronique c’est Shogun Audio. Ici représenté par Icicle, ce label est véritablement l’alpha et l’oméga du renouveau de la drum’n’bass. Car si Rinse est l’enclume, Shogun Audio et ses chiens de guerre – on pense de suite à Alix Perez, Friction, K-Tee ou Rockwell – sont le marteau qui frappe fort. Très fort.
Cette sélection n’est rien d’autre qu’une mise en musique respectueuse et appliquée de tout ce qui vient d’être dit plus haut. Fidèle à l’esprit « chien fou » de la radio qui héberge cette série de compilations, ce Rinse 19 ne dépasse pas l’heure de jeu, insiste sur le côté urgent des plaques comme si propager cette culture de l’underground était une question de temps. Comme si cette musique pouvait être volée hors des mains de ceux qui la composent et l’écoutent. Ce foutoir est superbement contrebalancé par l’ordre et la synthèse d’Icicle, et globalement toute cette nouvelle esthétique drum’n’bass qui offre des montagnes de possibilités. Fini les plaques qui avance par inertie, cette nouvelle drum’n’bass a pris ce qu’il fallait prendre dans le dubstep, la dub-techno et la neurofunk pour mieux te casser les pattes. Le résultat est génialement équilibré: Icicle fait varier les hauteurs et les couleurs dans une grande mosaïque de breaks massifs et ralentis, d’infrabasses qui rugissent comme un lion en cage. Une jolie façon de mêler bordel et organisation militaire, typique de ces gens de là-bas. On ne va pas vous ennuyer plus longtemps, l’essentiel est dit.