Ringleader Of The Tormentors

Morrissey

Attack – 2006
par Popop, le 16 février 2006
6

Quelle jolie musique que celle jouée en chœur par les médias depuis quelques semaines - en fait depuis que les premières copies promotionnelles de Ringleader Of The Tormentors ont commencé à circuler et que les textes de ce nouvel album ont été décortiqués vers après vers par des simili-paparazzi obsessionnels. Oui, ça y est, c’est officiel, Stephen Patrick Morrissey tire enfin son coup après des années de disette auto-proclamée ! A Rome qui plus est, et sans doute avec un homme – confirmant ainsi une rumeur qui court depuis deux décennies dans les milieux autorisés (qui n’ont vraiment rien d’autre à faire, il faut le croire). En plus, il ne s’en cache pas et le chante, toute pudeur remisée au placard et tous sentiments dehors. Quel événement, mes aïeux !

Bon, c’est pas qu’on s’en fout mais et la musique dans tout ça ? Que Moz prenne enfin du plaisir est une chose, qu’il continue à nous en donner après les émouvantes retrouvailles de You Are The Quarry en est une autre. Avec Tony Visconti aux manettes, les fantasmes les plus fous étaient permis et sur la seule foi des trois premiers titres, il faut bien avouer que le bougre s’y connaît en préliminaires : ça commence très fort avec "I Will See You In Far-Off Places" et ses nappes de claviers arabisants, ça continue tout en délicatesse avec l’épuré et sexuellement autobiographique "Dear God Please Help Me" (arrangé de main de maître par Ennio Morricone) et ça repart de plus belle avec le single "You Have Killed Me", un morceau qui ne paye pas de mine de prime abord mais qui révèle ses charmes au fil des écoutes.

A partir de là, l’étreinte se fait plus maladroite, tour à tour vigoureuse puis mollassonne, sans surprise mais efficace, routinière depuis toutes ces années mais souvent inspirée. Sans doute l’orgasme musical arrive-t-il trop tôt sur "Life Is A Pigsty", morceau de 7 minutes rappelant les plus beaux passages de Vauxhall & I, avec un Morrissey au sommet de son art vocal. C’est d’ailleurs là l’une des constantes de ce disque : jamais l’ex-leader des Smiths n’a aussi bien chanté ce qui rend encore plus frustrante la maladresse de certaines compositions ou de certains arrangements. Les chœurs de gamins italiens étaient-ils bien nécessaires ? Et pourquoi ce morne "At Last I Am Born" en fin de parcours ? Hop, un dernier coup de rein à la va-vite et on n’en parle plus ? C’est dommage après de telles avances…

Allez, ne soyons pas aigris, Ringleader Of The Tormentors est un bon disque, un successeur somme toute logique bien qu’inférieur à You Are The Quarry (qui compilait des morceaux écrits sur six longues années contre une seule pour le présent disque). Il n’est juste pas le chef-d’œuvre espéré après l’annonce de la collaboration entre l’une des plus belles voix de la musique moderne et l’un des meilleurs producteurs des trois dernières décennies.

Le goût des autres :
5 Splinter