Reincarnations Pt. 2
DJ Koze
Les pendules sont remises à l'heure d'hiver, le soleil nous fait la gueule et c'est désormais la pénombre qui nous accompagne au boulot. Les années ont beau passer, on a toujours autant de mal à admettre que les six mois à venir ne seront faits que de fatigue et d'obscurité. Adieu les bonnes résolutions de la rentrée, bonjour la morosité que seule une bonne bande-son arrive à conjurer. Et ça tombe bien, puisque dans son rôle de Mister feelgood, DJ Koze n'a pas attendu le déclin progressif de Kompakt pour s'en aller appliquer son imparable Midas Touch sur d'autres labels. Et personne ne s'en plaindra non plus vu qu'aujourd'hui encore, l'Allemand à le pouvoir de faire pleurer ta grand-mère sur la piste de danse. Son Amygdala l'an dernier, par exemple, vaut mieux que tous les sondages IFOP du monde: combien ont craint le casting bien dans l'air du temps, lui qui alignait sans pression Matthew Dear, Caribou ou Apparat ? Et surtout, combien de ces oiseaux de mauvaise augure ont validé le carton plein ? De nôtre côté, on confesse qu'on n'a pas trouvé plus belle galette à mettre au pied du sapin en 2013. Et ce, que ce soit pour faire plaisir au petit neveu biberonné à Avicii ou à la jolie collègue un peu froide du bureau d'en face.
Ce n'est pourtant pas avec un nouveau LP que DJ Koze revient en cette fin d'année – pour ça, il faudra encore attendre vu qu'il s'offre cinq années de parenthèse entre chaque sortie solo. Cette fois, il nous livre un nouveau cours de rattrapage de son impressionnant catalogues de relectures sorties entre 2009 (là où s'arrêtait le précédent volume donc) et aujourd'hui. Un gigantesque saladier où des gens comme Moderat, WhoMadeWho ou Soap&Skin se retrouvent entre les paluches d'un chef à qui il appartiendra de mélanger les ingrédients avec soin. Et ici, on ne fera pas faire mentir les interludes pleins d'humour qui ponctuent l'album, présentant DJ Koze le "best remixer ever": là où l'exercice est souvent pris par dessus la jambe et consiste à cachetonner sur le dos de titres dont les originaux ont fait leurs preuves, DJ Koze perfectionne depuis 15 ans son art de la bonne relecture. Tout chez l'Allemand réside dans l'art et la manière de se réapproprier une partie vocale, une mélodie, un sample, et de les détourner avec légèreté – voire dérision. De ce fragile équilibre et cette ambiguïté de tous les instants émerge une galette qui convoque l'imprévu, à l'instar de la deep-house du "You Saw It All" de Matthew Herbert métamorphosée en anthem rose bonbon dignee d'un B.O. de rom com, ou du "Golden Song" de Zwanie Jonson dont la beauté est sublimée par la retenue et le minimalisme appliqués au remix. Même les titres au traitement plus classique s'en tirent avec les honneurs, et se retrouvent enrobés d'une épaisse couche psyché qui solidifie l'ensemble, quitte à le rendre plus câlin et drogué encore. Le disque s'offre même une intelligente progression qui ferait presque oublier que l'on à affaire à une "simple" collection de titres.
Le résultat, c'est un album aussi délicat qu'aérien, taillé sur mesure pour les iPods des chanceux de la N.A.S.A. pouvant jouer avec la pesanteur. En attendant que l'espace soit à la portée de nos bourses, les terriens que nous sommes pourront voir dans Reincarnations Pt. 2 un disque parfait pour entamer un automne à la Calvin & Hobbes. Une preuve supplémentaire que ce vieux sorcier de DJ Koze est encore loin d'avoir dévoilé ses meilleurs tours, et que sa rareté ne le rend que plus magique encore.