Red

Datarock

Nettwerk – 2009
par Jeff, le 12 juin 2009
6

Groupe de scène par excellence, les Norvégiens de Datarock nous avaient quand même gratifiés en 2005 d'un album studio aussi détonnant que foutraque (Datarock Datarock) et qui contenait son lot de titres taillés sur mesure pour une bonne 'indie gaudiole' entre gens pas trop bien sous tous rapports - que celui qui n'a jamais esquissé un pas de danse légèrement décadent sur la bombe post-funk « Fa-Fa-Fa » me jette la première bière. Malheureusement, ce disque éponyme se révélait rapidement un peu trop bordélique et fourre-tout pour véritablement marquer les esprits – là où un concert du groupe laissait immanquablement un souvenir douloureux dans les mollets du spectateur. Aussi, afin d'éviter qu'un tel faux pas se reproduise et que le groupe ne s'attire à nouveau les foudres d'une presse et d'un public rarement enclins à tolérer une même erreur deux fois de suite, les gars de Datarock nous reviennent avec Red, disque autrement plus homogène que son grand frère et qui donne surtout l'impression de creuser encore un peu plus la veine « fête du slip à tous les étages » initiée par « Fa-Fa-Fa ».

Passée une intro tellement putassière qu'elle risque fort d'en décourager plus d'un, les Norvégiens aux superbes trainings rouges ne perdent pas une minute du précieux temps de l'auditeur et lui rentrent directement dans le lard avec « Give It Up », morceau qui sent bon le dancefloor et sur lequel le groupe nous sert son plat le plus populaire: une sérieuse dose de funk, une bonne louche de post-punk et un fifrelin de claviers ringardissimes histoire de donner à l'ensemble un caractère so 80's il est vrai du meilleur effet. On ne va pas vous mentir: c'est tellement bien torché que les chances pour vous de tomber dans le piège tendu par Datarock sont aussi élevées que celles de trouver des traces de coke et de Jack Daniels dans les analyses sanguines d'Amy Winehouse.

Le groupe ayant conscience de la beauté de son plan, il se dit qu'il ne lui reste plus qu'à dérouler et passer en mode « cruise control » sur le reste de Red pendant que le petit peuple se laisse aller à toutes sortes de mouvements lascifs sur des titres qui balancent sévère du bois – ce qui reviendrait à nous prendre pour une belle bande de cons, vous en conviendrez. Et comme je pars du principe qu'une bonne partie de notre lectorat dispose d'un Q.I. suffisant pour s'en rendre compte, elle aura comme votre serviteur de plus en plus de mal à poursuivre l'écoute du disque à mesure que défilent ces titres où se croisent David Bowie, Police, George Clinton, Michael Jackson et David Byrne - et aussi quelques innommables 'one hit wonders' des années 80 dont je tairai les noms par décence. C'est d'autant plus regrettable que certains d'entre eux sont appelés à rythmer notre été (« Dance », « The Pretender »), mais se fondent dans l'ensemble d'une masse un peu trop pantouflarde pour véritablement impressionner.

Au final, le résultat est pour le moins paradoxal. Alors qu'on reprochait à Datarock de ratisser un peu trop large sur son précédent effort, c'est sa propension à jouer la carte du monochrome sur le forcément bien nommé Red qui lui joue des tours. Au final, il nous reste la certitude qu'avec ce nouvel album plus boule à facettes que jamais, le groupe devrait plus que probablement confirmer son statut de groupe de scène cet été. La boucle est bouclée.