Policy
Will Butler
On imagine que vivre l’accouchement d’un album d’Arcade Fire ne doit pas être une expérience spécialement simple ou reposante. Pas qu’on parte du principe que les têtes pensantes du groupe sont une bande de pisseuses insupportables (à moins que...), mais plutôt que la musique du groupe, à tiroirs et strates multiples, fait généralement l’objet d’un travail minutieux - sans quoi l’ensemble prendrait rapidement des airs de bordel faussement grandiloquent (à moins que...). Dans cette configuration, on peut aussi imaginer qu’une pile électrique comme Will Butler se sente parfois à l’étroit. C’est en tout ce que l’on se dit à l’écoute de son premier album solo pour Merge Records.
D’un naturel exubérant, le frère du frontman Win Butler trouve ici un exutoire rêvé, où il peut laisser parler un songwriting qui lui ressemble, qu’il veut simple mais efficace, direct mais pas frontal, sincère mais pas douçâtre. Et si le nom de Will Butler sera toujours associé au groupe qui lui offre un coup de pub aussi inévitable que bienvenu, Policy ne peut en rien être considéré comme un side project qui permet de dresser des parallèles évidents avec la discographie du mastodonte montréalais – même si l’on en trouvera en cherchant un peu, ne serait-ce que dans cette manière de se mettre à nu, ici par l’entremise de textes un brin névrosés et plein d’humour noir.
Disque extrêmement varié, Policy évoque la pop élégante des Talkings Heads (surtout sur « Something's Coming »), les fulgurances folk d’un Johnathan Richman ou à le groove énergique d’un groupe comme Spoon. Il y a des chœurs féminins aussi, des trucs de crooner désabusé, et même des ballades d’une beauté déchirante. Bref, y’a énormément de choses. Pourtant, 27 petites minutes, c’est peu. Mais c’est aussi bien assez pour laisser le Canadien nous montrer qu’il sait occuper l’espace sans devoir donner dans les gesticulations bidon ou les effets de manche pompeux. Bref, même si l’on se contentera amplement de ces huit titres, on en redemande. Et vite.