Nux Vomica

The Veils

Rough Trade – 2006
par Splinter, le 2 octobre 2006
10

Attention, poids lourd. Il y a deux ans, The Veils avaient publié un très bon premier album plein de jolies promesses, The Runaway Found. Peut-être pas apprécié à sa juste valeur sur le moment, ce disque a magnifiquement tenu la distance et nombre des morceaux qui le composent font aujourd’hui figure de classiques : difficile en effet de se lasser de titres aussi réussis que "Lavinia", "More Heat than Light" ou "The Tide that left and never came back", le cœur de l’album. A tel point qu'à l'époque, l'auteur de ces lignes sentait bien qu'avec un peu de maturité, le groupe pourrait largement s'imposer. Aujourd’hui, Finn Andrews, leader d’une formation totalement recomposée depuis 2004, confirme d’une bien brillante manière les promesses de l'époque avec ce Nux Vomica aux accents de chef-d’œuvre intemporel. Rien de moins.

Porté par la voix protéiforme et étonnante de maturité d’Andrews, jeune homme de seulement 22 ans, Nux Vomica séduit avant tout par la richesse de ses compositions et la variété de ses ambiances. Oscillant avec autant de bonheur entre pop joyeuse et sautillante ("Advice for Young Mothers to be", juste énorme, "A Birthday Present", "One Night On Earth", addictive) et titres beaucoup plus sombres, rêches et bluesy ("Jesus for the Jugular", surprenante et essentielle, "Pan", extatique et exceptionnelle) ou tout simplement sublimes d’humilité et de retenue ("Under the Folding Branches", "House Where We All Live"), l’album touche la grâce du bout des doigts sur chacune de ses dix pistes extrêmement cohérentes, souvent tendues, proches de la rupture ("Nux Vomica", sommet du disque) et invariablement marquées par une émotion rarement atteinte depuis le Grace de Jeff Buckley.

Ainsi, loin des influences qui plombaient légèrement The Runaway Found, la faute sans doute à une production naguère un peu trop présente (Bernard Butler n'étant pas un modèle de subtilité), ce nouvel album illuminé ici et là de chœurs féminins à des années-lumière d’une mièvrerie qui aurait pu inquiéter au premier abord, fait en réalité plus que confirmer un talent que l’on sentait en germe : il consacre tout simplement Finn Andrews en tant qu'auteur à part entière, et révèle une personnalité que l’on imagine torturée et sereine, fragile et forte à la fois. Nux Vomica en est le fidèle reflet.

Une réussite brillante, un régal pour les oreilles et pour le cœur, un album juste indispensable, à peine voilé par un titre peu élégant pour les francophones.

 

Le goût des autres :
8 Jeff 9 Laurent_old 7 Nicolas 9 Popop