No Push Collide
Serafin
Si Serafin vient de sortir son premier album, son leader Ben Fox Smith n’est en revanche pas un inconnu : il a déjà officié notamment au sein de Stony Sleep, un groupe de noisy pop qui a eu le temps d’accoucher de deux opus avant de se séparer, sans doute sous l’impulsion dudit Smith, véritable tête pensante de ce combo plutôt sympathique. Cependant, les capacités du groupe n’étaient sans doute pas à la hauteur des ambitions de son chanteur, qui dispose enfin avec Serafin de la grosse machine dont il rêvait pour conquérir le monde.
Car, présenté par la presse anglaise comme la nouvelle sensation de la scène indie, Serafin risque bien en effet de devenir une référence incontournable. Souvent comparé à Muse, dont il partage le label et l’urgence mais pas l’esthétisme pompier, le groupe vient tout simplement de sortir l’un des meilleurs albums de l’année. Douze perles rock, rêches comme la voix de Ben Fox Smith, mais aussi terriblement mélodiques. Des hymnes faits pour les stades, à n’en pas douter, des morceaux que l’on a encore la chance d’apprécier sur scène dans des salles à l’ambiance intimiste – mais plus pour très longtemps.
De "Day by Day", le premier single, à "No Happy", en passant par "Numerical" ou "Lethargy", Serafin aligne les perles power pop aux refrains imparables et entraînants, tout en se révélant capable de créer des morceaux plus calmes, à l’image du très bon "Peaches from Spain". Et si l’on peut effectivement penser au Muse de Showbiz, ce No Push Collide se rapproche peut-être plus d’un album comme Nothing will go wrong du groupe allemand Slut, sorti récemment, voire, si j’osais vraiment, du "Creep" de Radiohead. Le mot est lâché ! Il est facile de donner Radiohead comme influence de nombreux groupes actuels, mais en l’occurrence la comparaison n’est pas forcément usurpée quand on écoute les textes cyniques et ironiques de Mister Smith, comme en témoignent ces quelques lignes de "No Happy" : "How can I feel morally rich / When I live with such a bitch / And the truth is so far down / That it’s easier to let it drown ?"
En quelques riffs bien sentis, Serafin impose son ambiance et accroche l’oreille comme finalement peu de groupes en sont capables actuellement. Ainsi, avec un seul album, ce quartet vient ni plus ni moins de prendre la tête d’un mouvement autrefois dirigé par Placebo (il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine…). Ni foncièrement original ni pâle copie de ce qui a déjà pu être produit auparavant, No Push Collide bénéficie d’une production excellente et du charisme de Ben Fox Smith. Un incontournable de l’année 2003.