Night Ripper
Girl Talk
En 2008, le mash-up, ce genre dont les codes ont été définis par les 2 Many DJ’s ou le collectif Hollertronix et dont quelques dignes héritiers (Go Home Productions ou Freelance Hellraiser) se sont chargés de faire perdurer l’héritage pendant quelques temps, a plus que jamais du plomb dans l’aile et ne semble intéresser qu’une poignée de fans irréductibles. Il faut dire que l’apparente facilité de l’exercice a poussé un nombre incalculable d’apprentis sorciers à inonder la toile de leurs propres créations, ce qui n’a pas vraiment joué en faveur du mouvement. Cependant, depuis bientôt deux ans, Greg Gillis, alias Girl Talk, redore le blason du genre et refait danser des foules énormes au son de mélanges bâtards et inattendus.
Mais tandis que l’immense majorité des bootleggers se limitent à marier deux titres bien connus de l’auditeur, Girl Talk joue lui dans la démesure la plus totale en mariant en moyenne une bonne quinzaine de titres souvent archi-connus dans un seul et même morceau. Sur Night Ripper, ce sont donc plusieurs centaines de morceaux de rock, hip-hop, R&B ou électro qui prennent part à l’immense partouze organisée par un Greg Gillis qui se prend pour le Hugh Hefner du bootleg. Inutile de tous vous les citer ici, mais pour vous donner une petite idée de la palette assez impressionnante de genres présents, sachez que peuvent se croiser sur une seule et même plage de Night Ripper des morceaux (ou plutôt le riff/le gimmick/le sample qui les a rendus inoubliables) des Pixies, de LL Cool J, de Neutral Milk Hotel, de Missy Elliott et de Steely Dan. A ce stade, il est essentiel de souligner que le résultat est tout sauf indigeste tant Gillis, à partir d’ingrédients complètement farfelus, parvient à accoucher de morceaux qui n’ont rien du mariage forcé et parviennent même à développer une personnalité qui leur est propre.
Night Ripper, c’est donc un disque aux usages multiples : c’est à la fois un blind test géant qui mettra vos connaissances musicales à très rude épreuve, une énorme boîte à souvenirs et – surtout – une impitoyable et irrésistible machine à danser. Et bien que Night Ripper soit sorti il y a bientôt deux ans aux Etats-Unis (il est disponible en Europe depuis peu grâce au label Gronland), la galette n’a pas pris la moindre ride et continue de délivrer un plaisir jouissif à chaque écoute. Vous l’aurez compris, ce disque est l’équivalent musical d’un steak béarnaise accompagné d’un bon verre de Nesquik chaud. A la seule différence que le disque de Girl Talk peut se consommer sans risque et sans modération…