Moosebumps: An Exploration Into Modern Day Horripilation
Dr. Octagon
Quand on demande à Google quels sont les meilleurs disques de rap de l’année 1996, le moteur de recherche omniscient nous sort un joli paquet de gros disques depuis entrés dans la légende: All Eyez On Me de 2Pac, The Score des Fugees, Reasonable Doubt de Jay-Z, ATLiens de Outkast, Illadelph Life de The Roots, ou Hell On Earth de Mobb Deep. Et au milieu de cette litanie de classiques, on croise un génial vilain petit canard: le Dr. Octagonecologyst de Kool Keith sous son alias Dr. Octagon - un chirurgien extra-terrestre qui se poste tout en haut d’une échelle du chéper allant de 1 à à Brigitte Fontaine. Un disque qui pue la déviance et s’inscrit à contre-courant des tendances de l’époque, une perversion de l’esthétique boom bap rendue possible par la réunion de l’ancien Ultramagnetic MC’s avec un producteur qui était sur le point de marquer la seconde moitié des 90’s de son empreinte (Dan Nakamura aka Dan The Automator) et d’une légende du turntablism, DJ Qbert. Un coup d’essai immédiatement transformé en coup de maître, et surtout un sommet que le groupe aura été incapable de titiller lorsqu’il se retrouvera 10 ans plus tard sur la coquille vide The Return of Dr. Octagon - un disque qu’aujourd’hui même Kool Keith et Dan The Automator ne prennent plus la peine de défendre, ça situe le niveau.
D’ailleurs, de leur propre aveu, Moosebumps: An Exploration Into Modern Day Horripilation est le véritable successeur de Dr. Octagonecologyst. Un constat que l’on peut difficilement contester à l’écoute d’un troisième album qui voit les trois larrons rester bloqués dans les golden 90’s et se borner à caresser leur public cible dans le sens du poil - triste paradoxe pour un projet qui semblait avoir quelques années d’avance sur la concurrence à l’époque. Ceci étant dit, quand le travail est bien fait comme sur « Octagon Octagon », « Polka Dots » ou « Hollywood Tailswingings », on a envie de croire à la résurrection de cette bande de weirdos magnifiques. Par contre, quand on lorgne vers la chute de studio ou qu’on juge opportun de laisser DJ Qbert faire une démonstration de scratching pendant 4 minutes consécutives, on détale devant la crainte de voir débarquer une horde de zombies en Airwalk et t-shirt Mo’ Wax. Après, ce disque de Dr. Octagon n’est pas bien différent des autres comebacks de ces cinq dernières années: on l’attendait avec un mélange de circonspection et d’impatience, comme c’est désormais le cas avec ces héros d’antan poussés par la crise de la quarantaine à sortir un nouvel album là où d’autres s’achètent une moto ou larguent leur femme pour leur secrétaire. On sait ce genre de démarche éminemment casse-gueule, et les accidents industriels nombreux. En prenant le parti de ne pas singer ou critiquer astucieusement les tendances actuelles qui pourrissent le rap (on a été assez fous pour y croire), Dr. Octagon sort un bon petit disque qui ne sert absolument à rien, si ce n’est d’apporter un peu d’eau au moulin de rageux qui pissent dans des violons.