Monster Head Room
Ganglians
C'est très simple, en fait : Ganglians, combo de hippies barbus de Sacramento, c'est Fleet Foxes en sale. Mêmes harmonies vocales, même ambiances élégiaques, même refrains à siffloter, même béatitude. Au moment de finaliser, on préfère toutefois ici le bordel, le tapage, les guitares klang et le psychédélisme prononcé plutôt que la production propre et classique. Résultat des courses : Ganglians sonne comme s'il était à Fleet Foxes ce que les Black Lips sont aux Kinks. Dans le panel du pop-rock harmonique actuel, ils sont les païens là où les autres se montrent surtout très œcuméniques. Le tronc est commun mais la branche, Ganglians, ils la fument, plutôt que de s'en servir pour se fabriquer une guitare en bois.
Braillard, déglingué, pochetron, drogué, garage, inabouti, juvénil, c'est forcément aussi plutôt sympathique, ces qualificatifs n'étant évidemment dédaigneux que dans une optique peigne-cul de la pire espèce, celle de ces «mélomanes» pour qui le rock se doit d'être propre, mélodieux, bien produit, abouti, adulte... Il faut, malgré cet enthousiasme certain, toutefois rester honnête : si ce Monster Head Room est (très) sympathique, il n'est pas non plus totalement renversant. C'est une étape plus qu'une victoire, le polaroïd d'un groupe en train de se chercher, qui ne s'attendait pas forcément à déjà intéresser autant d'oreilles avec ce premier album et n'a donc peut-être pas vraiment cherché à se dépasser. C'est un disque qui semble avoir été enregistré moins pour charmer l'auditeur que pour mettre à plat certaines idées, en finir avec d'autres, se laisser tenter par des directions nouvelles.
Une certaine branchitude internationale a décidé que des chansons comme "Lost Words", "The Void" ou encore "Valiant Brave" méritaient (à raison) le statut de culte de l'année. Tournant beaucoup, Ganglians s'est fait repérer, en live et forcément sur MySpace et, de ce fait, Monster Head Room est sorti de la masse d'infos comme quelque chose à quoi se raccrocher, à agiter. Paradoxalement, le groupe se voit désormais forcé de défendre ce disque dans les médias alors qu'il est en fait déjà ailleurs depuis quelques mois, avec un deuxième album -prétendu bien meilleur et plus significatif- dans la boîte. Inutile de préciser que c'est surtout celui-là qui risque d'être vraiment énorme et que, dès lors, Monster Head Room a surtout des allures de petite mise en bouche très très agréable, bien que pas forcément toujours très conséquente. N'en reste pas moins une certaine aisance à pondre de potentiels classiques, quand l'indulgence laisse place à une certaine concentration. Bref, comme nous aurait conseillé Omar et Guy, si vous passez par une agence PMU ou Ladbrokes, misez donc sur Ganglians...