Monnos
Conan
Il fallait en avoir des grosses comme des melons pour décider d’affubler son groupe d’un nom aussi kitsch. Quoique finalement, il apparaît comme assez cool de se glisser subrepticement dans l’imagerie viking/mythologie en mousse pour mieux jouer les puristes décontractés. Parce que oui, vous l’imaginez, Conan n’est pas une formation de rock wallon (pour avoir vraiment l’air con, autant s’appeler Hollywood Porn Stars) mais plutôt une grosse machine anglaise à faire grincer les guitares : un vrai gros groupe de doom metal en fait. Si le nom de ce trio n’est pas encore aussi ronflant que ceux du label Southern Lord ou Hydra Head, les amateurs du genre connaissent déjà toute les qualités de Conan. Peut-être parce que Horseback Battle Hammer était un EP/album tout simplement génial : gras, lent, violent et méchamment direct. Sorti autrefois sur Aurora Borealis – qui reste peut-être le plus gros vivier underground de la culture doom, ce premier effort révélait un groupe qui offrait un son de vétéran malgré une carrière qui débutait seulement.
Deux ans plus tard, c’est le premier véritable album qui voit le jour. Preuve que le groupe a su s’attirer la lumière avec une poignée de titres, on retrouve désormais Chris Fielding à la production, énorme coup de poker quand on sait qu’Electric Wizard demeure encore comme l’une des formations de sludge metal les plus appréciées. Etonnant d’ailleurs de voir que du côté de la production pure, le son du groupe s’est méchamment calmé. Attention, qu’on ne s’y méprenne pas, on reste ici dans le pachydermique, mais dans le pachydermique propre. Alors que les débuts de Conan étaient admirablement primitifs et bestiaux, le son devient ici plus clair, les guitares ouvrent leur jeu et l’ensemble gagne directement en amplitude. Fini les chants de pourceau en transe, le Conan nouveau tire ses chants entre vindicte et tirades atmosphériques. Le résultat est assez magique de singularité : c’est plus mûr, plus dans le narratif de la chose, et pourtant ça bute à tous les niveaux.
Parce que bon, Conan, ça reste une vraie grosse musique de Cimmérien en rut, un vrai truc pour ceux qui aiment violer des poules et bouffer des nouveau-nés. Un album qui va droit au but. En six titres et moins de quarante minutes, les trois cockneys balaient l’ensemble du spectre doom/sludge avec une pression de tous les enfers. C’est toujours aussi vilain, juste un peu plus réfléchi. Pas besoin d’épiloguer cent ans sur les tenants et les aboutissants de cette plaque qui sent la tourbe et le bourbon, Conan fait désormais partie des grands de la scène.