Mirror Mirror

Ghinzu

Pias – 2009
par Jeff, le 9 avril 2009
7

S'il est vrai que des formations comme The Tellers, Girls in Hawaii ou Sharko ont engrangé un joli succès critique et commercial hors des frontières belges ces dernières années, la véritable machine à vendre de la galette et à remplir de la salle de concert reste bel et bien Ghinzu. D'ailleurs, tourneurs et label commençaient sérieusement à se demander si ce troisième album de la formation bruxelloise allait finalement voir le jour – l'inusable et magnifique Blow datant quand même de 2004. Surtout qu'entre-temps, les rumeurs les plus folles ont circulé au sujet du groupe et de sa capacité à ne pas crouler sous le poids de la pression et d'une certaine suffisance, les effectifs ont connu quelques remaniements (un nouveau batteur et un nouveau guitariste notamment) et les fans du groupe sont passés par toutes les couleurs – on se souvient notamment de leur tronches médusées devant la prestation aussi exceptionnelle que catastrophique du groupe lors de l'édition 2007 du festival Les Ardentes.

Aujourd'hui, les pérégrinations de ces dernières années semblent bien loin quand on voit l'engouement que suscite la sortie très attendue de Mirror Mirror. Mais surtout, ce sont les pires craintes qu'on pouvait avoir au sujet de ce disque qui sont balayées après quelques écoutes à peine - pas de Chinese Democracy à la belge à l'horizon.

Ceci étant dit, que ceux que les poses énervantes et l'attitude condescendante de John Stargasm exaspèrent retournent se coucher immédiatement puisque le groupe n'a pas vraiment changé depuis qu'il nous a abandonnés à notre triste sort. Le grand barnum rock'n'rollesque façonné avec beaucoup de précision par un type dont les talents de 'marketeur' ne font pas que des dégâts sur les scènes de France ou de Belgique (pour la petite info, John Israël aka John Stargasm est aussi un publicitaire de renom) tourne toujours à plein régime, comme en témoignent les récentes dates du groupe en France ou en Belgique.

Mais s'il est vrai que Ghinzu joue la carte de la continuité sur cette nouvelle réalisation, il n'a néanmoins pas opté pour l'option "copie conforme" – ce qui aurait relevé du foutage de gueule pur et simple vu le délai d'attente entre Blow et Mirror Mirror. En effet, là où Electronic Jacuzzi et Blow étaient des albums qui ne demandaient qu'à montrer tout leur potentiel électrique sur scène, Mirror Mirror semble être un disque qui a été enregistré pour la scène, plus percutant et couillu que ses prédécesseurs. Et c'est peut-être le seul reproche qu'on pourra adresser à Stargasm et ses ouailles: d'avoir voulu nous en mettre plein les oreilles, en oubliant un peu que Ghinzu, c'est (c'était?) aussi une capacité incroyable à façonner des morceaux dont les montées en puissance orgasmiques propulsaient le groupe sur une autre planète, celle que regardent généralement de loin les formations belges ou françaises à l'ambition légèrement sclérosée. Ainsi, loin d'être mauvais, Mirror Mirror ne comprend pas ou peu (le trop court "Dream Maker") de morceaux rivalisant d'élégance avec "High Voltage Queen" ou "Blow" et donne parfois l'impression d'une fuite désespérée en avant – "Cold Love", morceau d'ouverture, en étant la plus bruyante preuve. Dans un tel contexte, il n'est pas étonnant que "Take It Easy", morceau plus posé aux relents Stroksiens incontestables, soit le véritable moment fort de l'album. Débarrassé de cette esbroufe parfois étouffante, la mélodie n'en devient que plus capiteuse et s'impose rapidement comme l'un des meilleurs trucs jamais écrit par les Bruxellois.

Malgré toutes ces critiques, Mirror Mirror n'en reste pas moins un album solide à la hauteur des ambitions affichée par un groupe qui a la prétention de voir un peu plus loin que les frontières de la petite Wallonie – ce qui est trop rare pour ne pas être souligné. Avec son lot de tubes potentiels qui feront un carton en radio et (surtout) sur scène, Ghinzu semble armé comme personne pour réussir son marathon estival et combler les désirs de fan avides de morceaux sexy et rock'n'roll. On n'en attendait pas moins de leur part.

Le goût des autres :
8 Popop 7 Franck 7 Nicolas 7 Julien Gas 7 Amaury L