Mirage

Saycet

Meteroes Music – 2015
par Yann, le 10 mars 2015
6

Sur son album précédent, Saycet m'avait fait chier. Les textures sonores qu'il utilisait sonnaient datées et ses compositions manquent d'audace pour rivaliser avec les maîtres de l'electronica ambiant. Globalement, même si on pouvait reconnaître l'effort, le tout m'en touchait une sans faire bouger l'autre. J'étais donc plutôt méfiant à l'écoute de ce nouveau disque, et je m'apprêtais à le jeter à la corbeille sans lui prêter beaucoup d'attention. Sauf que le virage pris par le Français sur ce nouveau LP a réussi à accrocher mon oreille : fini les plages atmosphériques barbantes, bonjour l'électro-pop planante.

Du coup, on accorde quelques écoutes supplémentaires au disque, pour pouvoir le décortiquer avec un peu plus de précision. Indubitablement, le succès de M83 est passé par là, et certains morceaux font fortement penser à la musique du compatriote Anthony Gonzales, parfois en bien (quand il tente de conjurer les belles montées électrico-électroniques des premiers albums), parfois en moins bien (quand il ne reste que la grandiloquence pompante de Hurry Up I'm Dreaming). "Mirages" est un bon single, mais sans le potentiel radiophonique de "Midnight City". Dans la veine pop, on peut également citer le passage "Meteores/Half Awake", en particulier le second titre où la voix masculine de Yan Wagner vient contrebalancer avec pertinence les arrangements qui accumulent parfois les clichés d'une musique qu'on qualifierait d'aérienne. En réalité, on les supporte uniquement parce que ces clichés, dans des formats plus pops, réussissent à créer une émotion. Ainsi, sur "Quiet Days", cela passe comme une lettre à la poste grâce à la mélodie et la voix, tandis que sur le morceau suivant "Cité Radieuse", on a beaucoup plus de mal à supporter l'emphase. Difficile de dire pourquoi ça fonctionne plutôt bien chez Moderat ou sur le premier album de Darkstar et pas ici. D'autant plus que la voix ne sauve pas tout, loin de là. L'interprétation n'est pas particulièrement inspirée, et c'est plutôt pour la structure et l'accroche qu'elle apporte qu'on l'apprécie. Ainsi, sur "Kananaskis" et, dans une moindre mesure "Volcano", le charme est loin d'opérer.

Bref, même si ce nouvel album de Pierre Lefeuvre marque un tournant qu'on peut saluer, on reste un peu le cul entre deux chaises en l'écoutant. Difficile de trouver chez lui une identité forte sans pour autant pouvoir lui offrir une place de choix dans la catégorie des "bons faiseurs de pop". Néanmoins, l'album reste agréable dans son genre, parlera probablement aux fans de M83 et pourra se glisser sur votre platine CD lors d'un dîner de famille pour cultiver votre réputation de "découvreur de talents" en France. C'est déjà ça de gagné.