Midnight Boom
The Kills
The Kills, duo garage rock intransigeant, minimaliste et sexué, connu pour ses poses extrêmes et anti-commerciales depuis cinq ans, se serait-il ramolli du bulbe avec l'âge ? C'est la question que l'on peut légitimement se poser, d'une part après la collaboration de VV, alias Alison Mosshart, au tubesque "Meds" de Placebo en 2006 (un sacrilège, voire un acte de prostitution pour les puristes) et, d'autre part, à l'écoute de ce troisième album, Midnight Boom, dont le son tranche notablement avec ses deux premiers opus, unanimement encensés par la critique, Keep On Your Mean Side en 2003, puis No Wow, en 2005, brûlots punk au rock squelettique, destroy, comme des White Stripes trash et glamour (tout ce que ne sont pas Jack ni Meg White, respectivement).
Il faut dire que, comme on l'avait noté ici il y a trois ans, la formule crypto-rock du groupe (une guitare, une boîte à rythme) avait montré ses limites au bout de deux albums et il appartenait à VV et Hotel (alias Jamie Hince) de réagir, de montrer qu'ils en avaient encore sous le pied, qu'ils étaient capables de séduire au-delà d'une frange réduite de rockeux plus attirés par les larsens que les mélodies travaillées.
Contre toute attente, c'est chose faite avec ce troisième opus, plus dense que les précédents, plus aisé d'accès aussi, grâce à des morceaux envoûtants et des orchestrations enfin un peu bossées, que l'on n'aurait jamais imaginées auparavant, le tout agrémenté d'une petite touche electro loin d'être désagréable ("Last Day of Magic", "What New York Used to Be"). L'influence de Brian Molko, nouvelle idole des 14-15 ans ?
Peut-être bien (ou pas), mais force est de constater que le changement est réalisé dès le premier single, "Cheap and Cheerful", ainsi que sur la troisième piste de l'album, "Tape Song", qui, sans renouveler totalement la formule, proposent toutes deux un son plus appétissant, comme un mannequin rachitique qui aurait décidé de manger à nouveau. Que dire alors de "Black Balloon", véritable tube, qui sonne presque comme du Garbage ? Que, tout simplement, le groupe a décidé de s'ouvrir, tout en gardant son imagerie noire désormais mythique, sans rien renier, comme en témoignent les "M.E.X.I.C.O." et "Sour Cherry" dans la seconde partie de l'album. Une réussite.