Magnifique
Ratatat
Oscillant depuis ses débuts entre rythmiques urbaines concassées et mélodies dancefloor, le son de Mike Strout et Evan Mast alias Ratatat a toujours eu tendance à éclabousser un peu les murs. Alors que la paire d'albums précédents (LP3 et LP4) suivaient tous deux la même dynamique gavée de synthés et de percussions tribales, Magnifique s'éloigne de ce côté brut pour retrouver une forme de facilité.
Est-ce cette apparente facilité qui fait qu'autant l'excitation est à son comble en France (papiers dithyrambiques dans Libé et les Inrocks), autant les critiques sont très mitigées de l'autre côté de l'Atlantique (à peine 5.0 chez Pitchfork, pourtant bon client)? Il faut dire que le Ratatat d'aujourd'hui sonne comme largement influencé par le Daft Punk des débuts (il suffit d'écouter "Countach" pour que la filiation éclate au grand jour), ce qui peut expliquer l'attirance de nos vertes contrées pour les deux souris de Brooklyn.
Moins expérimental donc, et beaucoup plus porté par les guitares que ses aînés, le disque contient son lot de tubes pour festival, à commencer par "Cream on Chrome" joué pour la première fois lors du dernier Coachella et que vous n'avez probablement pas fini d'entendre jusqu'à la rentrée. Quant à la triplette introductive en montagne russe formée de "Cream On Chrome" et son riff en rondeur, du très beau "Magnifique" et d'un "Abrasive" tout en groove décontracté, elle est particulièrement efficace. C'est après que ça se gâte un peu. En effet, le reste de ce cinquième album studio a plutôt tendance à osciller entre le très bon ("Nightclub Amnesia", le morceau le plus rugueux de l'album, rappelle les coups d'éclats de LP4) et l'anecdotique ("I Will Return" la cover finale de Springwater).
L'avantage de Magnifique, c'est que posé sur la platine en soirée il permettra au DJ fatigué de passer une heure accoudé au bar sans que l'ambiance s'en ressente le moins du monde. Il faudra quand même qu'il quitte de temps en temps du regard son écran d'iPhone pour zapper les titres les plus faibles ("Drift" et "Supreme"), dont la présence nous fait dire que la galette aurait gagné à être un peu plus courte et aurait surtout dû se concentrer sur ses deux points forts: le groove et le cool.