LUX

Aluk Todolo

Norma Evangelium Diaboli – 2024
par Albin, le 8 octobre 2024
8

Quand arrive un nouvel album d’Aluk Todolo, on se retrouve souvent à chercher comment pénétrer une oeuvre aussi opaque. Pour LUX, la question ne s’est jamais posée, car c’est le disque lui-même qui nous a immédiatement pénétrés. Tel un facehugger qui s’empare d’une tronche pour la féconder et engendrer un mignon petit alien qui fera « coucou c’est qui ? » en t’explosant le sternum, la musique des trois Parisiens a atteint un tel niveau de maturité sensorielle qu’elle s’impose directement à celle ou celui qui osera y aventurer de téméraires oreilles. Chercher à apprivoiser ce disque, c’est faire l’expérience traumatisante d’une perte de contrôle totale.

Bien évidemment, on évoquera quelques repères, entre les lignes rythmiques dignes du jazz metal d’Imperial Triumphant, les harmonisations tordues d’une guitare qui dévisse les têtes à force d’y chercher le début et la fin, et le son qui, sur le premier tiers de l’album, donne l’impression de ne chercher qu’à s’épaissir jusqu’à atteindre la masse infinie d’un trou noir. En vain.

L’album se décline en six morceaux quasiment indissociables, qui s’enchevêtrent pour former un bloc écrasant, béton sonore composite à base de jazz déboussolé, de krautrock vicieux et de riffs de guitare rugueux qui réussissent le mariage impossible du black metal et du surf rock. L’écoute de LUX se subit comme un voyage intérieur hypnotique, déconnexion maximale où l’on ne sait trop s’il faut fermer les yeux et s’allonger ou esquisser un pas de danse désarticulé et forcément maladroit.

Mais attention, on est ici projeté bien loin de la transe haute en couleurs comme peut nous en proposer par exemple Föllakzoid, ces transes qui élèvent et allègent. Aluk Todolo préfère enfoncer, absorber, avaler, digérer. Tout y passe : ton quatre heures, l'entente cordiale mais fragile avec tes boomers de voisins, ta raison et même la lumière. Et quand, au bout de 39 minutes de matraquage cauchemardesque, la machine s’arrête aussi brutalement qu’elle a commencé, ne reste que le vide, la désolation et les interrogations propres à toutes les addictions. Mais bordel, pourquoi c’est si bon de se faire du mal ?

Le goût des autres :