LP3
Ratatat
Alors que le duo américain nous avait laissés en 2006 sur un Classics toujours aussi méritant, Ratatat nous revient donc pour un troisième album qui, autant le dire d’emblée, s’annonce déjà comme un des grands moments de cette année. Toujours la même recette qui avait fait le succès des deux albums précédents : une louche de claviers rutilants, des rythmiques qui claquent comme il faut, et surtout un usage savant des guitares pincées et enlevées. A cette différence près que le duo joue cette fois-ci sur le terrain de l’émotion brute, du synthétisme à fleur de peau pour transcender ces treize titres à vocation internationale.
Tout annonçait l’album culte avec un « Shiller » qui met la claque d’entrée de jeu grâce à un alliage post-shoegaze bien aidé par son lot de guitares étendues de manière indéfinie, pour toucher déjà ici le substrat musical du duo. Et de guitares, il en sera question à chaque titre, à chaque minute et presque à chaque seconde. Une succession de tirades électriques qui rappellent aussi bien Kirk Hammett que David Gilmour et qui vient chapeauter, sinon se fondre littéralement, dans la masse électronique pour donner rapidement un hybride détonnant de savoir-faire proche d’un psychédélisme vivifiant et sûr dans sa progression. Car vous n’êtes pas censé ignorer que les meilleurs concepts ne sont jamais à l’abri du dérapage au moment de concrétiser l’essai. Heureusement pour nous, la mise en scène de LP3 tient du même génie que l’association première de ces instruments antinomiques. Car du hip-hop à l’electro-pop rythmique en passant par la musique tribale, Ratatat effectue des bonds d’une grâce féline, tirant le meilleur de sa formation sans jamais perdre une plume en chemin, signe définitif d’une compréhension profonde des instruments utilisés, sans considération de genres. Avec un tel programme, c’est donc logiquement que Ratatat s’interpose entre la franche déconnade et l’exercice de haute voltige.
Difficile d’établir l’identité précise de cette musique à la croisée des chemins : ni véritablement le combo électronique qu’attendent les kids ni cette formation organique qu’attendent les derniers fans de guitares perçantes. Un ovni qui n’a rien d’autre à proposer qu’une reconversion de Santana qui redécouvrirait le charme et l’innocence 8-bit pour définir avec prudence les contours d’un disque lyrique et, pourtant, à la délicatesse fragile. Un must.