Loops of Infinity (A Rave Love Letter)
DJ Metatron
“This is not a perfect party. We are not the perfect people” ouvre ce disque de DJ Metatron, et rien que cette phrase pourrait résumer celui qu’on a pu appeler Traumprinz, Prince of Denmark, DJ Healer ou encore Prime Minister of Doom. Car cela fait des années que DJ Metatron fait une musique pour les clubs vides et les gens qui dansent seuls. Oui, les soirées dont il compose la bande-son imaginaire sont loin d’être parfaites. Et il semble continuer de chercher une forme d’affirmation de lui-même, voire de rédemption, comme en témoignait un bouleversant Nothing 2 Loose marqué par une certaine forme de foi et sorti le jour de Pâques. C’est après ce qui s’affirme toujours plus comme un immense disque que sort, sans prévenir (comme d’habitude), Loops of Infinity (A Rave Love Letter), pour lequel il réutilise au passage un très vieux pseudonyme déjà utilisé (notamment en 2014), DJ Metatron.
Malgré un premier LP qui enchaîne les formats (très) courts et les loops trance, Loops of Infinity ne sera pas un disque de club et à ce petit jeu, les disques de Prince of Denmark, que ce soit 8 ou The Body, étaient justement beaucoup plus traditionnels dans leur approche de la techno. Non, ce disque de DJ Metatron se veut dans la lignée de ses disques plus contemplatifs et introvertis, à rester quelques pas en arrière et à regarder la foule danser plutôt que le DJ l'animer. De la trance, il ne s’agit ici que de réutiliser les mélodies toujours directes (certains diraient simplistes) et surtout l’aspect émotionnel immédiat. Tout au long de ces 90 minutes, il est en effet question de la fin de l’euphorie, de la descente tranquille qui précède le calme, et des retours de soirée doux-amers à la manière d’un Burial, de nostalgie et de mélancolie déployées tout au long de morceaux dans lesquels on erre et on se se perd.
Oui, il faut se perdre dans Loops of Infinity, et au-delà même de ça, le jouer dans le mauvais ordre, passer des morceaux, faire vivre ce disque. Loops of Infinity est en effet un disque sans réelle narration, surtout sur sa première partie où les seules transitions intéressantes tiennent alors plus de la sérendipité, à l’image de ce silence après « Loop ‘92 » pour mieux en faire jaillir l'excellent cut « Loop ‘97 ». Même à la fin, le disque ne se terminera pas sur son « Outro », préférant repartir sur « Love With U Is Real ». Et puis surtout, ce très long disque fait tellement la part belle à la répétition, réutilisant ses propres boucles d’un bout à l’autre du disque que l’on n’a pas fini de s’arrêter sur un morceau, s’y perdre et en revenir pour mieux y retourner. « What If There's No End And No Beginning », s’interrogeait déjà DJ Metatron en 2016, et ce disque vient synthétiser tout son amour pour cette musique qui ne s’arrête jamais, présente mais toujours diffuse, constamment dans cet entre-deux. De la musique pour le Planet Uterus fermé pour cause de Covid, où seul DJ Metatron continue d’errer comme le fantôme de l’Opéra, profitant d’un petit moment de solitude. Qu’on aimerait pouvoir y être également.