Le Sylphide de Brighton
Crâne Angels
Quand on se fait appeler les Crâne Angels, avec accent circonflexe et souvent sans le The de rigueur, que l'on compte parmi ses membres des gens au sobriquet aussi farfelu que Père Botibol, J.C Satàn ou Nunna Daul Isuny, et qu'on intitule son premier album Le Sylphide de Brighton, c'est qu'on a forcément quelque chose d'original à raconter. Pourtant, détrompez-vous. Cette troupe de treize Bordelais ne pourrait être plus commune. Mais qui a dit que la qualité ne se trouvait que dans l'inédit? Donc, la composition du génome des Crâne Angels est d'une banalité confondante: entre le rock incantatoire tel qu'on le retrouve sur le Funeral d'Arcade Fire, le folk en mode "tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil" des cousins américains d'Edward Sharpe & the Magnetic Zeros et les élucubrations choralisantes de The Polyphonic Spree, on peut sans le moindre problème retracer l'arbre généalogique du groupe et dresser par la même occasion la liste des disques de chevet de chacun de ses membres sans trop se planter.
Mais voilà, en plus d'y mettre beaucoup de cœur à l'ouvrage, la joyeuse troupe française y ajoute une écriture placée sous le sceau de la sensibilité qu'un enthousiasme aussi débordant que communicatif ne saurait masquer. Certes, sur leur premier single de la formation bordelaise (qui contenait notamment l'irrésistible "Virgin"), on avait déjà décelé une envie folle de laisser libre cours à ses pulsions et de tout donner, quitte à prendre le risque de sombrer dans l'optimisme exaspérant de béatitude. Mais en quelques mois, les progrès accomplis semblent énormes: le dosage des émotions est aujourd'hui maîtrisé, et les Crâne Angels renvoient l'image d'un groupe soudé autour d'un projet commun et cohérent, et non celui d'une communauté d'idées au sein de laquelle le tirage de couette serait la règle et non l'exception. Sur ce disque résolument américain, dans le fond comme la forme, on se réjouit d'y découvrir une formation d'une fraîcheur revigorante, capable de vous dégourdir les plus raides des membres. Et bon dieu que ça fait du bien!