KHALED KHALED
DJ Khaled
Multimillionnaire accompli et véritable star des réseaux sociaux – son omniprésence sur TikTok et Snapchat est embarrassante – DJ Khaled est aujourd’hui au sommet de son art. Enfin, façon de parler, tant le rôle de l'entrepreneur floridien dans la conception de ses disques reste plus flou que notre vision un soir de réouverture des bars. Est-il producteur, distributeur, rappeur ou simple animateur ? En réalité, son rôle se rapproche davantage de celui de gourou : il rassemble les bonnes personnes au bon moment, puis récolte le fruit de leur travail. Ce business model, ultra lucratif, DJ Khaled l’utilise sans gêne depuis 2006, et il n’est visiblement pas prêt de changer son fusil d’épaule. La preuve avec KHALED KHALED.
En parcourant la tracklist, l’approche du seul prédateur de la planète en Gucci de la tête aux pieds est douteuse et fait planer de sérieux doutes sur la pertinence de son projet. En effet, comme d'habitude, on nous sert un melting-pot insipide de hits plus inintéressants les uns que les autres, uniquement glorifiés par la présence des stars qui ont bien voulu y associer leur notoriété – et accessoirement accepter le gros chèque qui va avec. Si Khaled avait, ne serait-ce que pour une fois, proposé un storytelling un tant soit peu cohérent (et on est pas très exigeants avec lui), alors on aurait pu sortir de cette infernale spirale d’insignifiance qu’est sa discographie. Surtout qu’au vu du casting cinq étoiles, les possibilités de réaliser quelque chose de grandiose sont immenses.
Malheureusement, le Floridien manque fatalement d'ambition. Résultat des courses, chaque artiste présent sur KHALED KHALED a, dans sa propre discographie, des titres bien plus marquants. Une balade mielleuse de Justin Timberlake ? N’importe quelle titre de The 20/20 Experience surpasse aisément le fadasse « Just Be ». Un lead single avec Drake ? Sorti en juillet 2020, la hype autour de « Popstar » est essoufflée depuis belle lurette. Un banger avec Cardi B ? « Big Paper » est loin d’être aussi explosif que « Up ». La liste est longue, et s’applique à l’ensemble des titres de KHALED KHALED – excepté peut être « Sorry Not Sorry » qui marque le retour d’une collaboration entre Jay-Z & Nas, deux légendes au passif mouvementé, et qui nous transporte à l’époque d’American Gangster et Hip-Hop Is Dead. Malheureusement, ce court instant de nostalgie n’a absolument rien à avoir avec DJ Khaled lui-même, dont la contribution se limite aux habituels mantras et cris de guerre façon « WE THE BEST MUSIC » ! En fait, DJ Khaled a Neymar, Di Maria et Mbappé dans son onze de départ, mais il les fait tous jouer en défense.
La triste réalité de la carrière de DJ Khaled est qu’il n’a probablement pas les épaules pour se la jouer chef d’orchestre, sortir de sa zone de confort, et proposer autre chose que la B.O. de la vie d'un influenceur de seconde zone à Dubaï. Ainsi, l’envie de faire un vulgaire copié-collé de la chronique de son disque de 2016, Major Key, nous a effleuré l’esprit. Après tout, si DJ Khaled se fout de notre gueule depuis quinze ans, à nous répéter les mêmes schémas monotones au possible, alors pourquoi pas nous ? Surtout que la conclusion de notre article d’antan résonne toujours aussi juste en 2021: « malgré son casting impressionnant, ce nouvel album studio se positionne exactement dans la lignée de Kiss The Ring, Suffering From Succes et I Changed A Lot : des disques que, soyons honnêtes, plus personne n'écoute aujourd'hui. Another one... »