Keys To The World
Richard Ashcroft
Accusé Richard Ashcroft, veuillez vous lever. Dans l'affaire « Mad Richard et son ego contre le reste du monde et surtout la scène musicale britannique actuelle », le jury va rendre son verdict. Chacune des pièces à conviction a été examinée, soupesée et estimée à sa juste valeur, et la décision a été prise à l’unanimité, nous tenions à le préciser avant de procéder à l'énonciation (si le greffier pouvait arrêter de se curer le nez deux secondes, l’instant n’en serait que plus solennel - merci cher ami).
- Attendu que l'accusé a, dans ses vertes années, fait partie d’un groupe nommé The Verve (avec ou sans le "The" selon les années et les humeurs), et s'est rendu coupable de trois délits musicaux, le premier franchement mauvais, le second passable et le troisième franchement bon ;
- Attendu que l'accusé, sur fond de plagiat musical, de sample litigieux et de droits d’auteurs mal négociés (une situation déjà réglée en justice), a considérablement contribué à renflouer les comptes bancaires de Sir Jagger et Mister Richards, certes deux personnalités pas à la rue mais merci quand même pour eux ;
- Attendu que de séparation en reformation puis en nouvelle séparation, l'accusé a prouvé être l’un des personnages les plus instables et les plus égocentriques de la scène musicale britannique (allant jusqu’à rentrer sur scène au son de "Cast No Shadow", un morceau que son caractère de cochon et sa personnalité tordue a inspiré à Oasis) ;
- Attendu que l’accusé a sorti un premier album solo, Alone With Everybody vraiment bon, écrit au moins un grand titre classique ("A Song For The Lovers" pour ne pas le citer), flirté avec Brian Wilson, le gospel et le blues sur son deuxième méfait en solitaire (Human Conditions, nettement moins bon déjà) ;
- Attendu que les déclarations précédant la sortie du présent opus faisaient état de « shit hot », de « moments de pur rock’n'roll », de « passages à la beauté luxuriante » ;
- Attendu que l’accusé, dans un élan de rare modestie, a récemment déclaré vouloir être simplement considéré comme « un grand songwriter britannique » ;
Pour toutes ces raisons, le tribunal ne pardonne pas à l’accusé de sortir un album aussi médiocre que Keys To The World, que d'aucuns n’hésiteraient à qualifier de mou du gland, prétentieux, surproduit voire de sous-composé. Le tribunal condamne donc Richard Ashcroft à retourner à son solfège et à son manuel du parfait petit songwriter (édition 1968, copyright Paul McC. et John L.). Il sera enfermé en studio de longues années durant jusqu’à ce que, Dame inspiration faisant son effet (with a little help from sex & drugs & alcohol… ou pas), il sorte enfin un disque digne de ce nom. En attendant, son nom restera dans le grand dictionnaire du rock'n'roll à la lettre V comme Verve. Affaire suivante, faites entrer l'accusé Graham Coxon…