I Am Very Far
Okkervil River
Okkervil River fait partie de ces groupes à qui l'on ne peut quasi rien reprocher: une carrière exemplaire, des albums faisant l'unanimité et un public fidèle qui suit les Américains depuis leurs débuts en 1998 – à l'époque, le groupe comptait encore un certain Jonathan Meiburg en ses rangs, ensuite parti former Shearwater. Dans de telles conditions, on sent la formation texane tout bonnement inattaquable. Et il ne faut pas de nombreuses écoutes d'I Am Very Far pour tirer une conclusion assez simple : cette cinquième réalisation est elle aussi exempte de tous reproches. Will Sheff semble une fois de plus privilégier une certaine forme d’intensité, qui rapproche parfois les groupe du Arcade Fire de Funeral, et partant de ce principe, le natif d’Austin nous tricote des mélodies tantôt paisibles tantôt tendues, ou americana, folk et indie rock se renvoient la balle sans pour autant donner l’impression que la cohabitation est impossible.
Mais il y a quelque chose de fondamentalement énervant avec Okkervil River en 2011 : on a l’impression que malgré des albums de très bonne facture, le groupe peine à passer à la vitesse supérieure et séduire les masses – en gros, à réussir ce que The National avait réussi avec son magistral The Boxer pour ne citer qu’un exemple. Car si on n’a plus le moindre doute sur les talents de songwriting d’un Will Sheff, on aimerait qu’en bon chef d’orchestre, il tire ses acolytes encore plus vers le haut, histoire qu’Okkervil River ne nous ponde pas un bon disque traversé par des moments de pure grâce, mais bien un disque qui ne serait qu’un long moment de pure grâce. Car il suffit de prendre les meilleurs morceaux d'Okkervil River pour réaliser que l’Américain a pondu son lot de titres indispensables, du genre à vous faire hurler de bonheur ou pleurer toutes les larmes de votre corps – quand ce ne sont pas les deux à la fois.
Mais pour l’heure, il faudra se contenter d’un très bon disque, d’un niveau clairement au-dessus de la moyenne, mais qui laisse penser qu’Okkervil River en a encore suffisamment dans les tripes pour nous pondre un véritable petit chef-d’œuvre. C’est un constat assez sévère certes, mais établi avec la conviction que le prochain album du groupe nous donnera raison.