Hot Creations : Hot High Lights
Various Artists
C’est devenu une tendance largement répandue: dès que les choses se mettent à tourner un peu bien pour un producteur, il crée son label. Véritable syndrome de la surmédiatisation qu’a offert internet aux apprentis joueurs de house ou de techno, la création de son propre label – souvent précédée de quelques EP’s, pour les plus patients – montre la volonté exacerbée de se distinguer dans un espèce de grand bordel où tout le monde aurait sa chance, où tout le monde pourrait exister malgré tout. Cette situation n’emporte pas de manière définitive des conséquences irréversibles – à terme, la sélection naturelle fait le job – mais cette démarche taille à la scène électronique un profil à l’exact opposé de l’effet initialement désiré : à force de vouloir trop vite tout avoir, on perd méchamment en visibilité. Hot Creations : Hot High Lights en est l’exemple le plus terrible, même si la caricature est à nuancer quelque peu ici.
Pardonnez notre ignorance, mais jusqu’ici on n’avait pas trop écouté les sorties de chez Hot Creations. Peut être parce que, au-delà du manque de temps, ce label n’avait de viabilité que par l’identité de son cofondateur. Nuance immédiate obligatoire, puisque Jamie Jones est tout sauf un newbie en manque de reconnaissance, lui qui a été longtemps le chef de file de grandes vitrines house tels que Freak’n’Chic ou Crosstown Rebels. Une sorte de contrat clé sur porte où le patron de label te vend sa structure comme un vrai produit à son image, avant une autre mutation, et peut-être un nouveau label. Ce produit fini peut enfin s’entrevoir dans cette jeune rétrospective que nous tenons délicatement en main. Une réputation qui a vite fait de Hot Creations une niche pour producteurs inconnus, et méchamment convaincus. Deux ans d’existence et une réputation d’intouchables après, Hot Creations peut maintenant fermer toutes les gueules médisantes. Autrefois dans la plus grande discrétion, aujourd'hui dans une furia entre buzz mérité et plaisir coupable.
Parce qu’en vingt-quatre titres – et une sélection mixée qu’on imagine flamboyante, si seulement le disque marchait sur notre platine – la structure anglaise aligne un savoir-faire house assez unanime, et généralement ravageur. Hot Creations : Hot High Lights est à l’image de sa pochette: calorique, coloré façon Instagram et jamais loin du gros cliché. Une esthétique américanisante, qui fait chanter les puputes sur des refrains soul/r’n’b, des lignes de basse à te faire gicler une cervicale et des claviers qui font chanter les plages de sable blanc. C’est d’ailleurs autour de la colonne refrain entêtant/groove débilisant que fonctionne la machine Hot Creations : au moins un de ces deux éléments – les deux, souvent – font de chacun de ces titres une véritable machine à faire suer les strings. Et ça marche bien, pendant plus de deux heures sans discontinuer.
Si on ne remercie pas forcément les résidences à Ibiza, il faut avouer que la vraie force de ces gars – on fera plus attention désormais à des gars comme Lee Foss, Waff ou Miguel Campbell – est de jouer la carte de l’hédonisme béat jusqu’à la corde, de rendre flou la frontière entre classicisme puritain et musique de gros beauf’. Toujours est-il que c’est irrésistible, et sur une aussi longue distance, cela ne doit plus rien au hasard. Hot Creations : Hot High Lights, ou la première vraie raison de voir l’été enfin débuter.