Home Again
Michael Kiwanuka
Chaque année, la BBC parie quelques kopecks sur un artiste qui rêve d’être un peu plus qu’une hype du moment ou le chouchou de la blogosphère le temps d’un été. Cette année, un peu à la surprise générale, c’est Michael Kiwanuka qui a décroché la timbale au nez et à la barbe de Frank Ocean, Azealia Banks ou A$AP Rocky, succédant ainsi à des gens comme Franz Ferdinand ou Dizzee Rascal. Mis sur orbite par quelques singles prometteurs (« Home Again » ou « Tell Me A Tale ») et une première partie sur la tournée européenne du poids lourd Adele et auréolé des lauriers susmentionnés, le songwriter anglais que tout le monde s’empresse déjà de comparer au gotha de la soul et du R&B des 60s – Otis Redding en tête – déboule pourtant sur la pointe des pieds avec Home Again, premier album entouré d’un buzz finalement raisonnable. Et surtout en phase avec les qualités du jeune homme. Car si la presse, surtout anglaise, a bien un défaut, c’est de penser que tout le monde a à y gagner dans cette course effrénée à l'engouement artificiel. On ne va pas vous citer d’exemples, les bacs à soldes de n’importe quel FNAC sont plus parlants que de longs discours.
Profitant donc de la frénésie finalement modérée des canards européens, Michael Kiwanuka peut nous présenter dans de bonnes conditions Home Again, un disque a priori sans grandes prétentions (si ce n’est celle de ne pas trop sonner dans l’air du temps) mais dont la principale qualité est certainement son côté attachant. Car malgré un songwriting souvent un peu emprunté, le jeune garçon d’origine ougandaise parvient à nous montrer avec quelle aisance il a pu digérer un pan entier de la musique soul, sans pour autant s'y consacrer exclusivement. Car on trouve également sur Home Again des inflexions psychédéliques, aux confins de la pop et du folk. Une agréable valeur ajoutée.
Mais tout cela reste bien gentil. Trop gentil même. Ainsi, on navigue d’un bout à l’autre de ce premier album dans une ambiance qui flaire un peu trop le « je-ne-voudrais-surtout-pas-vous-déranger-ma-bonne-dame ». Et à l’arrivée, ce qui ressemble à première écoute à un bel objet dopé à l’huile de coude et réalisé avec une belle minutie se révèle surtout être une carte de visite un peu trop fadasse pour vraiment convaincre. Mais on mentirait en disant que l’on ne tient pas ici un garçon talentueux. Disons plutôt que son second album ne sera pas celui de la confirmation, mais celui de la révélation. La vraie.