Hombre Lobo : 12 Songs Of Desire
Eels
On ne le dira jamais assez : E va mieux. Après avoir traversé le désert de long en large et après avoir pondu, dit-on, ses albums les plus fameux (de Beautiful Freak à Daisies Of The Galaxy), le "Dog Faced Boy" nous proposait en 2004 Blinking Lights And Other Revelations, généreux double au ton assez léger, ainsi qu’un best of de ces années fort noires (Meet The Eels : The Essential). Cette mouvance rétrospective, propre aux groupes qui atteignent un âge respectable, se prolongeait avec la parution de Useless Trinkets, une collection de faces B et de raretés, doublée d’une distribution régulière de titres sur le site de l’artiste ainsi que la parution d’un live ou l’autre. Manifestement, Mark Oliver Everett n’a pas chômé : une façon, peut-être, d’expier ses envahissants problèmes personnels une fois pour toutes.
Au bout de cette spirale positive (et de nouveau chez Vagrant), on découvre Hombre Lobo, pour lequel E a retrouvé le faciès pileux qu’il arborait sur Souljacker. Cet album n’hérite pas seulement du look de son ainé mais également de ses sonorités plus brutes et rugueuses. En effet, Hombre Lobo est nettement plus bluesy que ses prédécesseurs directs. E ne fait rien pour épargner ses cordes vocales (qui en ont certainement vu d’autres), ce dont on se persuadera à l’écoute de « Prizefighter » ou de « Tremendous Dynamite », qui font la part belle au hobo de Seasick Steve (plus qu’à celui d’un certain dandy au chapeau mou bien connu).
Chose curieuse, Hombre Lobo est aussi très épuré, ce qui en fait une plaque toute particulière dans la discographie de Eels : l’emploi du xylophone est minimal, pareil pour le sampling de boites à musique et autres qui rendent leur place à des rythmes et des guitares bien péchues (« What’s a Fella Gotta Do »). Le seul titre de la plaque à rester dans la tradition des cordes et claviers est « All the Beautiful Things ». C’est donc une caractéristique remarquable du « son Eels » qui disparait quelque peu. Un bien ou un mal ? A vous, cher lecteur, d’en juger.
Quoi qu’il en soit, E n’a pas laissé tomber le songwriting ultra-efficace et les balades mélancoliques qu’il avait l’habitude de concocter pour notre plus grand plaisir. « The Longing » est probablement un des titres les plus poignants qu’on ait pu entendre de lui, tandis que « That Look You Give That Guy » ou « Oridinary Man » rappellent les plus légers des morceaux de Daisies Of The Galaxy tels que « Jeanie’s Diary ». Pas de surprise de ce coté là, l’oncle E reste très cohérent et nous sert ce qu’il sait faire de mieux : des titres habités qui rendent nostalgique et rêveur.
Au final, Hombre Lobo n’est sûrement pas le plus grand des albums de Eels, mais il détient quelques belles pièces de talents qui méritent un coup d’œil appuyé.