Hollow Earth
Pye Corner Audio
Le chroniqueur musical doit-il être considéré comme un écrivain frustré ? Un scribouillard relégué en 4e division moldave ? Un postillon de Guillaume Musso ? Sans tomber dans cette dernière extrémité, quiconque s’est essayé à l’art littéraire connaît la frustration engendrée par l’écriture : les phrases supprimées, les blocages, le choix bancal et approximatif des mots, les tournures de phrases hasardeuses. Pour ma part, j’aurais grandement aimé avoir le temps et surtout le don d’écrire de la SF avec ce qu’il faut du style de Alain Damasio, un côté épique à la Isaac Asimov allié à l’inventivité de Philip K. Dick. Manque de pot, on en est loin, alors je vous parle de musique.
Si de manière hypothétique vous aviez du subir ma grande œuvre de Space Opera, il est certain qu’elle aurait pu avoir pour bande-originale Hollow Earth de Pye Corner Audio. Dans ce monde bâti par Martin Jenkins à grands renforts de claviers analogiques 80’s, il est certain que mes robots humanoïdes auraient trouvé leur bonheur dans le plus pur respect des lois de la Robotique. C’est également sur « Descent » que mon héros aurait parcouru la ville à la recherche de ses ennemis, avec toute la classe de Rick Deckard. À quelques encablures de là, une navette à propulsion plasma se serait délicatement posée sur le sol de Mars sur le vaporeux «Imprisoned Splendour », tandis que -SPOILER ALERT- mon héros aurait trouvé la mort de la main d’un Extros sur les échos lointains et angoissants de «The Hidden City ». Vous l’aurez compris, vous avez évité une des plus grosses purges de la littérature de science-fiction.
Ce qui reste néanmoins sûr, c’est la puissance cinématographique qui se dégage de ce nouvel album de Pye Corner Audio. Dans une débauche de claviers dignes de John Carpenter ou de Legowelt, le producteur britannique déploie de nouveau un décorum dans la droite lignée des ambiances d'un Stasis de 2016 qui recelait déjà cet univers SF rétro. Entre vrai travail de production et hommage à l’univers de la SF à l’ancienne, c’est sur cette corde plus que raide qu’ « Hollow Earth » tire toute sa virtuosité. Sans jamais tomber dans une sorte de pastiche comme peuvent le faire (à merveille) Zombie Zombie, PCA se réapproprie les codes du genre rétro-futuriste pour nous faire voyager en vitesse supraluminique pendant une petite heure.
À défaut d’avoir découvert le nouveau Dan Simmons en lisant cette chronique, vous pourrez au moins vous targuer d’avoir découvert un excellent album de musique électronique. Mission accomplie, on rentre à la base.