Great Surround
The Fatales
La crise du disque est bel et bien là, mais il faut saluer le travail des passionnés. Car s’il n’est plus une source de profit pour bon nombre d’artistes, il reste néanmoins une carte de visite indispensable pour décrocher des concerts. Ainsi, les labels indépendants sont toujours fidèles au poste et font toujours cet indispensable travail de défrichage. À l’instar de Monopsone qui, après nous avoir fait découvrir le post-rock de Giardini di Mirò et la poptronica en français de novö, nous sort une merveille cold-wave qui pourrait enterrer à elle seule les infâmes Editors. Son nom : The Fatales.
Remarquée sur une compilation répondant au doux nom de Je t’aime, éditée par le label québécois Where Are My Records, la formation new-yorkaise aura mis quelques années à accoucher d’une suite à l’EP Pretty In Pixels (2004). Grâce à la main tendue par la structure mancelle, The Fatales publie donc Great Surround en guise de premier effort. Produit à Athens dans les studios d’Andy LeMaster (Bright Eyes, Azure Ray, Now It’s Overhead), cet opus est une véritable arme de séduction massive. Ténébreux et romantique, l’univers du quatuor américain pourrait être le point de rencontre entre Interpol et les Tindersticks. Eminemment cinématographique, Great Surround ne dépareillerait pas non plus dans une œuvre de David Lynch. Au-delà des comparaisons d’usage, ce disque est également une réussite en raison d’un agencement plus qu’harmonieux des titres. Si avec "Evergreen" la formation de Wayne Switzer parvient à faire décoller avec brio Great Surround, le sommet de l’album réside avant tout dans l’enchainement "Vanishing Act" – "Stadtpark" où la tension dramatique est à son comble. Après quoi, il ne reste plus au groupe qu’à dérouler, notamment en faisant planer l’auditeur (un "Violette" éthéré au possible, un "City en Route" instrumental) avant de l’achever avec un "Torches" plaintif et nostalgique.
Pour un coup d’essai, The Fatales témoigne d’une grande maturité et d’une rare maîtrise de tous les paramètres qui entrent en ligne de compte dans la conception d’un album. Mise en lumière par Monopsone, dont le flair lui permet de dénicher un groupe outre-Atlantique, la formation new-yorkaise mériterait une reconnaissance publique plus conséquente tant elle réalise un parcours sans faute sur ce Great Surround. Un disque crève-coeur...