Goodbye
The Czars
Non seulement ce troisième album des Czars se sera fait attendre, mais en plus il a bien fallu ne jamais voir le jour. Alors que le groupe engrange sortie après sortie les commentaires les plus enthousiastes en provenance de la presse, il semblerait bien que le public, même connaisseur, ait décidé de bouder ces esthètes folk américains, le quintet ayant eu besoin de l’aide financière de leurs plus fervents fans pour aller jusqu’au bout de l’enregistrement de Goodbye. Il faut bien avouer néanmoins qu’il eut été dommage que l’aventure s’arrête avec le très bon et imprononçable EP X Would Rather Listen To Y Than Suffer Through A Whole C Of Zs de 2002, tant ce nouvel opus semble enfin concrétiser tous les espoirs placés dans le groupe à la sortie de Before… But Longer et déjà entraperçu à plusieurs occasions dans la discographie du groupe.
Abandonnant le son électrique de son prédécesseur (The Ugly People Vs. The Beautiful People, paru fin 2001), Goodbye est un disque d’une subtilité touchante, tutoyant les cimes déjà fréquentées par Lambchop, Bonnie ‘Prince’ Billy ou Jim O’Rourke. Clairement, le charme de cette formation repose dans la voix chaleureuse mais insidieusement mélancolique de John Grant, imposant sa présence tutélaire du début à la fin sans pour autant reposer sur la particularité écorchée d’un Will Oldham ou les ténèbres d’un Kurt Wagner. Mais combinée à des compositions du calibre de "Paint The Moon" ou "Hymn", elle porte indéniablement The Czars vers d’autres horizons, parsemés des gammes de gris avec lesquelles aime à jouer le groupe. D’ailleurs, cette monochromie revendiquée se révèle être à la fois l’une des principales forces des américains mais aussi leur faiblesse, chaque titre nécessitant plusieurs écoutes pour être apprivoisé, ou du moins cerné, ce que n’est pas prêt à faire l’auditeur lambda.
Seul l’ultime morceau, "Pain", vient rompre cet univers parallèle avec ses trois minutes de rock bien senti, sorte de retour à la réalité nécessaire pour le groupe comme pour ses fans. Goodbye donc, s'inquiètent ces derniers en souhaitant que le titre du disque ne soit en rien annonciateur d’une quelconque séparation. Avec une tournée européenne récemment annulée pour cause de manque de motivation des tourneurs et des labels, on ne peut s'empêcher de craindre le pire.