Good Lies
Overmono
Même si nous étions conscients de ne pas prendre un risque énorme, nous nous étions quand même permis de jouer les Paco Rabanne de pacotille à la fin de l'année dernière : ensemble, Bicep, fred again.. et Overmono allaient rouler sur la musique électronique britannique et entamer un règne sans partage dont on avait du mal à entrevoir la fin. Quelques mois plus tard, Bicep se fait plutôt discret mais prépare un retour qu’on sait très attendu ; quant à l’ascension de Fred again.., elle a encore été plus fulgurante que tout ce qu’avaient pu prédire les observateurs – on parle d'un artiste qui, en 12 mois à peine, est passé de l'Orangerie du Botanique à la clôture d'un des plus grands festivals au monde, où il a réussi à en effacer des tablettes un des fiascos les plus retentissants de son histoire.
Il nous reste donc Overmono, dont on suit la montée en puissance, plus lente, depuis au moins cinq ans. Plus lente certes, mais pas moins fracassante pour autant : issus des cénacles techno pour l’un et drum’n’bass pour l’autre, les frères Truss et Tessela ont crée un monstre d’efficacité dont l’une des caractéristiques premières est de ne pas trop jouer sur les acquis glanés en solitaire, mais plutôt d’aller piocher dans des genres auxquels on ne les associait pas prioritairement – post-dubstep, electronica ou UK garage. Biberonnés depuis ses débuts en 2016 avec l’EP Arla par le mastodonte indie XL Recordings, qui y connait un rayon en matière de bonne gestion de hype (Vampire Weekend, BadBadNotGood, King Krule), la paire galloise a depuis mené une OPA hostile sur nos playlists – « Bby », « So U Kno », « Le Tigre », « Bromley », « Gunk », « Quadraluv » les ont colonisées.
Autant de titres qui, à l’exception de « So U Kno » et son breakbeat burialesque, ne se retrouvent pas sur le premier d’album d’Overmono – alors que d’autres ne se seraient pas privés de les recycler pour lancer une carrière. Cela peut se comprendre par la volonté du duo de s’imposer la contrainte d’un format album auquel il faut donner un fil rouge et une consistance narrative dont on peut se passer sur EP. Sauf que si écrire un album est une affaire de storytelling, alors Good Lies est plus proche d’une comédie de la Bande à Fifi que d’une série de David Simon. Ce qui fait de ce premier une mauvaise blague, heureusement pas de mauvais goût. Au contraire, on a surtout l’impression que tout le budget mis à la disposition des frères Russell est passé dans la com’ et les visuels – la seule réussite incontestable du disque, avec « Good Lies » et « Is U », les seuls titres que l’on a envie de sauver du naufrage. Car les écoutes successives, pénibles, révèlent un disque à la beauté plus stérile qu'un bloc opératoire, où tout a voulu être pensé dans les moindres détails, jusqu’à priver le disque de cette spontanéité et cette énergie qui rendaient le projet si passionnant.