Goblin

Tyler, The Creator

XL Recordings – 2011
par Soul Brotha, le 17 mai 2011
8

En quelques semaines, Goblin est devenu la sortie hip hop la plus attendue de l'année. Il faut dire que le buzz autour de la galaxie Odd Future est monumental depuis ce passage mémorable chez Jimmy Fallon. Si vous nous êtes fidèles, vous savez ce que signifie l'acronyme OFWGKTA et ce deuxième album de Tyler, The Creator est le premier disque d'un membre du collectif à être distribué par le circuit classique.

On pouvait se demander si le coté ovniesque de Tyler (son étonnante maturité lyricale et musicale, l'univers sombre et dérangeant de ses morceaux) allait demeurer dans ce projet sur-buzzé et ultra attendu. La première écoute de l'album dissipe ce doute, il s'agit d'une suite directe de Bastard, son premier opus sorti en indé. Oui, Goblin, en vente dans tous les megastores occidentaux, ne s'ouvre totalement qu'à ceux qui ont téléchargé un .rar sur Mediafire. On peut dire que Tyler, The Creator est le nouveau cauchemar des marketeurs de maisons de disques... Le son sombre, noyé de synthés flippants caractéristique à la petite bande est aussi de retour. Pour autant, il serait faux de dire que l'album est monolithique et rébarbatif - on y trouve même certaines respirations comme "She" et ses petits accents vaguement R&B portés par le coqueluche Frank Ocean ou l'instru barrée "AU 79".

Le propos, lui, reste encore et toujours le même. Tyler y parle en vrac de son désarroi existentiel, de son obsession pour les licornes et les dinosaures, des filles, de son père absent, de la mort... On est pourtant loin d'assister à une longue complainte geignarde. Goblin est surtout un album décalé, et il est à peu près impossible de prendre tout ce que raconte ce grand dadet au sérieux. On est plutôt ici entre la psychanalyse et la vaste blague. Comme tout ce qu'a produit Odd Future jusqu'ici en fait.

Finalement, ce premier album officiel de Tyler, The Creator possède les mêmes qualités et défauts que ceux sortis gratuitement. On y trouve la même qualité, une rigueur et une intégrité artistiques intactes. Certains travers persistent aussi, en particulier une trop grande longueur: 70 minutes de musique étalées sur 15 pistes, c'est copieux et respectueux de l'auditeur mais c'est surtout trop. Pour autant, on a envie de pardonner à Tyler, The Creator ce péché mignon. Il faut dire que Goblin réussi là où beaucoup ont échoués. Le tournant de la signature en major ne l'a absolument pas perturbé dans son cheminement et cette étape n'apparait désormais que comme un simple détail dans l'ascension irrésistible de cet étonnant artiste. Même s'il est encore perfectible et doit un jour ou l'autre penser à s'ouvrir au reste du monde (histoire d'aérer sa musique), Tyler s'affirme définitivement comme un artiste majeur du hip hop game, quelques petits mois à peine après son entrée dans la partie. Contrat ou pas contrat. Swag.

Le goût des autres :
6 Jeff 7 Thibaut 4 Justin 6 Laurent 9 Bastien 9 Ruben