Go Tell Fire To The Mountain
Wu Lyf
De Wu Lyf, on a l’image d’un groupe impénétrable et ayant le chic pour entretenir le mystère. Entre le site internet plutôt 13ème degré, les influences improbables (le Barça et le Wu Tang), les vidéos énigmatiques balancées sur le Net et les refus quasi systématiques de donner des interviews, le buzz est rapidement monté autour de ces Anglais considérés par beaucoup comme l’un des groupes les plus enthousiasmants de 2011.
Mais derrière cette attitude férocement anticonformiste semble se cacher une machine très bien huilée dont le seul but est de faire de Wu Lyf une marque de fabrique. En effet, petit détail qui a son importance, l’excellent blog Said The Gramophone a pu établir que derrière le management de Wu Lyf se cachait en fait un certain Warren Bramley, fondateur de l’agence four23 qui a notamment pour clients Samsung, Oakley ou Adidas. Pour l’attitude à contre-courant des tendances dominantes, on repassera peut-être. Et on ne vous parle même du chemin de croix pour pouvoir écouter l’album avant sa sortie: déclaration de confidentialité et cinq petites écoutes en streaming pour se faire une idée. Ceci étant, le plan marketing a fonctionné à merveille : le disque est pour ainsi dire introuvable sur la toile (un véritable exploit en 2011) et le buzz a atteint de proportions inimaginables il y a encore six mois. Dans ce contexte, on aurait presque envie de condamner le groupe avant même d’avoir écouté le disque. Erreur. Grossière erreur.
En même temps, on avait depuis quelques mois une petite idée du truc qui allait nous tomber sur le coin de la tronche : sur les dix titres présent sur Go Tell Fire To The Mountain, une petite moitié sont déjà bien connus des fans, et suffisent à se faire une idée des idéaux défendus par le groupe. On associe souvent le mot « pop » à la musique des petits gars de Manchester, mais on comprend vite que ce seul mot ne permet pas de les étiqueter correctement. Quelque part entre la flamboyance des Flaming Lips, le lyrisme exacerbé des premiers Arcade Fire, l’insouciance de Vampire Weekend et le minimalisme froid de The XX se cache l’OVNI Wu Lyf, dont les atouts ne manquent pas, à l'image de la voix éraillée, émouvante et tout bonnement exceptionnelle de Ellery Roberts ou de l'ambiance quasi pastorale qui traverse le disque.
Mais l’autre grande force de ce premier album, c’est de ne pas trouver son principal argument de vente dans l’un ou l’autre single susceptible de donner une vie en tête de gondole à Go Tell Fire To The Mountain. Mais si c’est là que le disque à sa place, c’est pour son incroyable cohérence. C’est bien simple, sur les dix morceaux répartis sur une petite cinquantaine de minutes, il n’y a absolument rien à jeter. Go Tell Fire To The Mountain s’écoute comme un tout, non pas parce c’est comme ça qu’il a été conçu, mais plutôt parce qu’il ne connaît pas le moindre temps mort et qu’une fois l’expérience entamée, il sera bien difficile de l’écourter.
On a envie de dire que dans sa catégorie, Go Tell Fire To The Mountain est un indispensable. Mais Wu Lyf étant un groupe tellement singulier, on a bien dû mal à lui trouver des semblables à qui le comparer. En même temps, c’est peut-être mieux comme cela pour une éventuelle concurrence qui, c'est à peu près sûr, ne peserait pas bien lourd…