Glow On
Turnstile
Impossible de passer à côté de cette sortie, tant le niveau de hype autour de Turnstile flirte toujours autant avec les cimes. Objet de fascination et très en vue depuis son éclosion, le groupe est parvenu à s’imposer comme l’un des plus excitants et innovants de sa génération, celui qui devra faire sortir le hardcore de ses retranchements. L’élu au sein d’une scène trop souvent enfermée dans ses certitudes finalement. Si la bande faisait son trou il y a déjà 10 ans avec un punk hardcore déjà groovy mais bien plus primitif, autant vous dire tout de suite que du chemin a été parcouru depuis. A l’heure d’aborder leur troisième LP, le sentiment que Turnstile se fout toujours autant des étiquettes prédomine et on ne pourrait pas plus s’en réjouir.
Car Glow On a tout d’un grand disque. Tout d’abord, parce que les fondations de ce qui ont fait de Turnstile un groupe incontournable sont encore bien présentes. Les Américains n’ont pas leur pareil pour proposer des refrains accrocheurs sur des riffs thrashisants et (en apparence) extrêmement simplistes. Mais la donne à désormais changé et Turnstile n’a aucune honte à faire cohabiter son “crossover/fusion” des débuts avec de la power-pop. Autrement dit, Turnstile pousse le curseur plus loin que sur Time & Space et n’hésite jamais à décontenancer.
Outre une multitude d’effets et d’arrangements intelligemment intégrés sur ces 35 minutes, de nombreux petits détails dans la production confèrent aux morceaux un côté hautement intéressant et il n’est pas rare de trouver sur Glow On des sonorités qui n’ont pas grand chose à faire sur un disque de hardcore – en ce sens, "DON'T PLAY" ou les deux collaborations avec Blood Orange sont de jolis résumés de cette nouvelle approche. Notons aussi que la production est assurée par Mike Elizondo, un mec plutôt habitué à travailler avec Maroon 5 ou Twenty One Pilots qu'avec des groupes de punk. Grâce à une approche plutôt grand public, il s’assure ici que le disque maintient un niveau d’intensité plus haut que les nuages de sa cover. Il y a un peu de tout sur ce disque, à la fois solaire et énergisant, qui saura autant convaincre les zinzins du pit que les amateurs de mélodies plus délicates.
En plus de son accessibilité, Glow On se révèle bourré d’hymnes taillés pour le live, domaine ou Turnstile excelle. “You really gotta see it live to get it” comme l’affirme l'insaisissable bassiste Franz Lyons sur “NO SURPRISE”. Oui, nous sachons. L’amour, la liberté d’être soi, le rejet de l’immobilisme sont autant de thématiques abordées ici par un Brendan Yates, en total contrôle de ses capacités vocales. À la fois cohérente et inclusive (outre Blood Orange, Julien Baker fait une apparition furtive), la vision du hardcore prônée par Turnstile démontre à quel point ce genre peut continuer de se transcender sans se renier.
Il est encore un peu tôt pour employer le terme game changer mais de par sa diversité et son efficacité, Glow On a tout pour être considéré le meilleur travail de Turnstile à ce jour, l’une des sorties les plus sexy de l’année et un futur classique. Euphorisant, bourré d’influences diverses, il semble imprégné d’une énergie positive qui n’est pas sans rappeler les classiques de Shelter ou Youth Of Today, des anciens de ce jeu affublés d’un statut légendaire auquel la formation du Maryland pourra certainement prétendre un jour. Turnstile a toujours eu le feu sacré, en dépit des critiques des puristes, et même s’il ne suffit pas d’ajouter de la pop et de la reverb pour cartonner, les étoiles s’alignent au-dessus de cette œuvre tubesque et irrésistible, conçue avec le cœur, et qui permet à Turnstile de garder la lumière braquée sur eux. Glow On Baby.