Flume (Deluxe Edition)

Flume

Future Classic – 2013
par Aurélien, le 10 décembre 2013
7

La musique de Flume n'est pas vraiment un exemple d'audace, et c'est sans doute pour cette raison qu'on n'a pas vraiment soutenu l'Australien jusqu'ici. En fait, on a eu beaucoup de mal à comprendre le succès critique du beatmaker qui, des pages de Pitchfork jusqu'à celles de Cosmopolitan, a fait à ce point l'unanimité qu'il a été jusqu'à éclipser son voisin de pallier Ta-Ku, pourtant plus méritant. Et il aurait pu en être ainsi pendant longtemps si l'on ne s'était pas laissé tenter par la formidable date parisienne du jeune homme il y a peu, et qui annonçait la réédition d'un album éponyme paru l'an dernier, agrémenté d'une mixtape joliment fournie en invités de marque et de l'intégralité des remixes du bougre. L'occasion de faire un point sur le phénomène, mais aussi de conter l'histoire d'un joli retournement de veste.

Car de la même façon que Disclosure s'est fendu d'un charmant album en mode 'UK Garage pour les nuls', Flume fait ici de la musique de beat tape pour celles et ceux qui sont réfractaires à ce format d'écoute il est vrai plutôt exigu. Ainsi, l'Australien compose de façon extrêmement épurée, à la limite du je-m'en-foutisme. Sa musique semble évidente, presque vulgaire, et s'oblige à apporter du relief en ramenant quelques voix Lana Del Rey-esques (comme sur le tubesque "Insane") au beau milieu d'un gros tas de titres riches en nappes cosmiques et que n'aurait pas renié l'écurie Soulection ("Space Cadet", "Sleepless"). Et si c'est toute cette simplicité qui tire les deux tiers de ces beats colorés (et foncièrement dansants) vers le haut, c'est malheureusement aussi cette absence radicale de prétention qui fait plonger l'album dans le sens inverse. Et bien que les ratés soient rares - citons l'infâme "On Top" ou le quelconque "Bring You Down"-, on a un peu le sentiment que la galette manque de cette audace qui en ferait autre chose qu'un cahier des charges consensuel, qui applique une recette efficace mais aussi un peu réchauffée. Alors pour compléter ces imperfections, on ne peut que saluer l'idée de ramener des types comme Ghostface Killah, Stalley, Killer Mike ou encore Freddie Gibbs le temps d'une courte mixtape. Ajoutez à cela une jolie palette de relectures et vous aurez entre les mains un produit qui démontre combien, à seulement 21 ans, le beatmaker profite d'une position idéale qui va jusqu'à donner tout le cachet d'un projet sur lequel on ne cachait pourtant pas notre indifférence quelques semaines plus tôt.

Le fin mot de l'histoire, c'est que derrière ce retournement de veste soudain se cache une envie: celle de savoir comment va mûrir la musique d'Harley Streten - et plus encore de savoir s'il sera en mesure de nous prouver qu'il n'est pas le branleur magnifique que ce Flume laisse l'entendre. Car il cristallise trop de promesses d'avenir pour penser qu'il se choisira une destinée à la Calvin Harris. Mais si tel est le cas, ce serait foutre en l'air toute la confiance générée par une Deluxe Edition qui porte bien son nom, puisqu'elle elle composée de trois disques et d'un DVD. Une Deluxe Edition sans laquelle on n'aurait peut-être jamais trop compris l'engouement autour de la musique de Flume.