Fishing For Fishies
King Gizzard & The Lizard Wizard
Difficile de hiérarchiser les déceptions procurées par un mois d’avril qui, entre le retour de Game Of Thrones, et celui de King Gizzard & The Lizard Wizard, s’annonçait difficile à assumer en termes de fréquence éjaculatoire. Ce qui devait n’être qu’un véritable marathon orgasmique s’est malheureusement dissous dans un fleuve d’amertume. Car à force d’attentes et de projections frôlant l’irrationnel, on en est venu à fantasmer plus que de raison ces retours dans notre quotidien . C’est donc quelque part une bonne olivette du destin, un rappel à la loi pour tous ceux qui, comme nous, font preuve d’une certaine propension à l’optimisme. Il serait cependant difficile de dénigrer complètement ce que l’on a tiré de ce tiercé d’avril, et notamment du dernier album des Australiens.
Ce Fishing For Fishies, on l'attendait comme le divin enfant des grands prédicateurs psychédéliques, tant sa gestation paraissait interminable vu la productivité d’un groupe qui, rappelons-le, nous a quand même pondu 5 putains d’albums en l’an 2017. D’où la légitimité de notre anticipation, puisqu’une tribu capable d’amalgamer si pertinemment quantité et qualité pouvait être attendue au tournant après une pause qui représenterait pourtant pour la plupart des artistes le temps à peine nécessaire au démoulage d’un cake.
Cependant, même si Fishing For Fishies n’est évidemment pas une daube infâme, il n'est pas pour autant un grand album reptilien. King Gizzard & The Lizard Wizard donne dans la pop ludique et solaire, parfois onirique, qu’il équilibre par un boogie plus crépusculaire et crasseux afin de conférer davantage d’épaisseur et de relief à sa musique. Bien que la grande partouze instrumentale et la patte des Australiens soient de la partie, il semble évident que certains titres font office de bouche-trous. C’est le cas notamment de " Boogieman Sam" auquel on peut coller l’étiquette savante de « Sympa, mais pas incroyable », d'un "Acarine" qui bénéficie du titre de « dans le registre je préfère "Horology" », et d’un "This Thing" qu’on renommera « Merde, c’était quoi la mélodie déjà ? ».
Et puis quand KG&TLW publie avant la sortie du disque l'inédit et ultra-efficace "Planet B", plaidoyer écologique capable de réveiller les morts - y compris ceux que la famille Lopez a ingurgités, on se demande assez innocemment pourquoi ne pas avoir joué la carte de la diversité jusqu’à l’inclure en fin d’album. D’autant que celui-ci s’inscrit dans la lignée d’un disque dont les paroles auraient pu être écrites par Aymeric Caron. King Gizzard y joue en effet la carte militante, œuvrant pour la cause écologique, laquelle génère d’authentiques coups d’éclats à l’instar du taquin morceau éponyme ou du joliment foutraque "Plastic Boogie".
Alors déception oui, tristesse non. Fishing For Fishies reste un album appréciable, sur lequel s’affirme davantage au chant comme à l’harmonica le leader des Murlocs, Ambrose Kenny-Smith. Un album inégal certes, parfois en deçà de ce à quoi nous avait habitué le groupe, mais très loin de nuire à sa réputation. En somme, Fishing For Fishies n’est pas tant un album déméritant qu’un album insatisfaisant qui, s’il ne sera pas la pièce phare de notre étagère, n’en demeurera pas moins source de quelques plaisirs à piocher. Entre ça et le visionnage du troisième épisode de la série de HBO, on se dit que, finalement, ce mois d'avril n'est quand même pas trop mal.