Fiction Fiction
Terence Fixmer
Alors qu’il fut un temps où le nom de Terence Fixmer figurait sur toutes les lèvres, il faut bien avouer que les dernières années se sont déroulées sans avoir à souligner une quelconque participation du Français à la cause électronique. Bien que Terence continue encore et toujours de propager la bonne parole techno aux quatre coins du monde, il faut sûrement comprendre cette absence comme une résultante logique de l’évolution musicale de ces dernières années. Car aux côtés de producteurs tels que The Hacker, David Carreta ou encore Vitalic, Terence Fixmer a représenté longtemps la France électronique au sommet de l’electro-glam à grosse tendance EBM, encore symbolisée à l’époque par le célèbre label de Dj Hell, International Gigolo Records. Entre temps, cette vague electrotrash s’est vue supplantée par d’autres rejetons de la hype : la French touch 2.0 venait de reléguer l’electro-glam au rang mouvance tristounette et bien passéiste.
Bien que radicale, cette mutation n’a pas complètement enterré les gigolos de Dj Hell, et le label de Vitalic, Citizen, a su au fil des années reconquérir la place qui était la sienne dans un sillon plus typé techno/electro. C’est dans cette conjoncture que bon nombre de fans ont perdu leur héros électronique préféré. Mais à entendre le changement aujourd’hui, il ne fait nul doute que cette petite cure bien loin des studios d’enregistrement a été salutaire à Terence, capable à nouveau de provoquer l’impatience auprès de ses auditeurs, voire carrément de les surprendre au tournant. Fiction Fiction annonce en effet un retour du Lillois à des considérations bien plus techno qu’auparavant. Sans pour autant galvauder l’héritage electro qui est le sien, Terence Fixmer redonne là ses lettres de noblesses à une electrotech sombre et puissante tout en évitant les clichés tenaces du passé.
Véritable bombe d’énergie dancefloor, ce nouvel album aligne les tubes de manière frontale sans pour autant perdre en chemin son intelligence de jeu. Cette intelligence rime avec un sens affiné de la production, qui le pousse à disposer ses pions de manière à provoquer l’échec et mat à tous les coups. Jamais trop hermétique, cette techno à consonance electro propose ses charmes de manière libérée et totalement décomplexée, assurant avec ses ambiances dark et moites le sérieux du propos. Finalement, il apparaît que le Français a su se détacher de ses vieux démons (essentiellement les gimmicks qui tachent inutilement) tout en gardant ce qui faisait déjà l’intérêt de sa musique à l’époque, à savoir la force de frappe et la tenue d’une techno que l’on aime aussi martiale. Finalement, Fiction Fiction renoue avec l’image d’une certaine techno à la française, un mythe à l’évolution sinueuse qu’il a partiellement façonné avec ses congénères. Et même si cet album n’est pas encore à ce stade un prétendant au titre de l’album techno de l’année, il consacre le retour réussi de ce qu’on peut appeler maintenant un vétéran de la musique électronique, ce qui est loin d’être donné à tout le monde.