Fabriclive 50

dBridge & Instra:Mental

Fabric – 2010
par Simon, le 2 juin 2010
8

Cette époque est définitivement bénie. D'ailleurs, si l'un de vous nous prenait à vomir sur cette année musicale, qu'il n'hésite pas à nous donner la bastonnade sur le champ. Béni soit en tous cas le dubstep qui, en plus d'être devenu l'une des valeurs sûres du champ électronique, a su ne jamais se relâcher pour proposer une longue série d'évolutions pertinentes (techno, ambient, crunk, grime). Mais il est un exploit encore plus grand accompli par cette scène maintenant bien établie, c'est celui d'avoir su générer dans son sillage un regain d'intérêt pour la drum'n'bass. Cette dernière a toujours eu le mauvais rôle, se faisant saboter de l'intérieur et anéantir par l'effet boomerang de son jeu de production, de la tentation du « tout à 170 BPM ». En somme, la drum'n'bass a été la première victime de ses trop nombreux serviteurs, comme une reine bouffée par sa ruche.

Pourtant, les îlots de résistance ont toujours subsisté - on pense notamment à l'excellente écurie Soul:R qui compte dans ses rangs toute l'arrière-garde de la drum'n'bass à caractère soul, à savoir des cracks comme Marcus Intalex, Commix, Lynx ou encore Alix Perez. Mais ils ont toujours considérés, à tort, comme de poussiéreux reliquats. Un délit de sale gueule aujourd'hui désavoué, car tant le neurofunk (les technomonstres qui gravitent autour de Noisia et qui mêlent une d'n'b breakée avec des gros traits electro) que la drumstep ont eu raison de ces clichés. Pour ce qui est de cette dernière, ce cinquantième épisode de la série Fabriclive en sera une preuve irréfutable.

Ce croisement dubstep/drum'n'bass est avant tout une histoire de famille, comme d'habitude chez ces talentueux Anglais. En effet, deux labels trônent en haut de la chaîne alimentaire drumstep : Nonplus+ et Exit Records, labels respectivement menés par Instra:Mental et dBridge. Rien n'est ici innocent. Cette caste bien organisée (et surtout bien aidée par les autres cadres de cette sphère : Riya, Actress, Consequence, ASC) a eu la bonne intelligence de s'extirper à temps des canons drum'n'bass autant que dubstep, de façon à rimer comme un nouveau sub-genre de la bass music sans jouer les enfants pourris gâtés. Tout nous fait ici penser au dubstep : basse lourde, infrabasses omniprésentes, rythmes proches d'un 140 BPM de type « classique ». Mais à l'inverse, tout nous évoque une certaine drum'n'bass : rythmes félins, groove 100% rythmique, utilisation calibrée de pistes vocales.

La bonne nouvelle, c'est que tout cela est réinvesti dans un cadre nouveau, totalement référencé et pourtant d'une liberté totale qui fait passer cette équipe pour une bande de furieux innovateurs. On se mange une anxiété musicale qui se traduit par des rythmiques racées, des subs aiguisées, des ambiances enfumées et des attitudes techno qui viennent souvent parfumer le tout par en haut. Comme un signe ultime de ce qui vient d'être dit plus haut, on retrouve ici des vieux pionniers du dubstep (Skream, Vaccine, Scuba, Distance) autant que de la drum'n'bass (le Belge Alix Perez). Une nouvelle famille vient donc de naître, et loin de constituer son acte de naissance (ce qui serait une insulte aux dizaines de EP du genre déjà sortis), cette sélection mixée vient confirmer qu'un crew aussi solide que celui mené de front par dBridge et Instra:Mental est prêt pour une énième révolution. Et nous? On suit et on admire.

Le goût des autres :
7 Julien