fabric presents The Streets

The Streets

Fabric – 2024
par Aurélien, le 18 juillet 2024
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Vous l’avez déjà constaté plus haut, alors on va s’efforcer d’être brefs et pas trop méchants : si vous aviez encore l’espoir de voir Mike Skinner revenir dans une forme au mieux correcte, passez votre chemin. Faites aussi l'impasse sur son dernier album, et celui d’avant tant que vous y êtes. Alors puisqu’on achève bien les chevaux, finissons-en avec cette Arlésienne vieille de plus de dix ans : on adore le bougre, mais chez nous la page The Streets est définitivement tournée. Vous nous trouvez méprisants ? Hargneux ? Attendez de lancer Fabric presents The Streets, et puis surtout écoutez-le jusqu'au bout et d'une traite, et puis on en reparle.

Puisqu’il va bien falloir s’efforcer de trouver un peu de positif, affichons-le d’entrée : il y a eu un bref moment où l’on s’est dit qu’à défaut d'afficher sa technique, Skinner allait donner le meilleur de lui-même dans une sélection lui rappellant ses jeunes années de geezer sous ecsta dans les raves de Paul Oakenfold. Depuis le temps, on est bien placé·es pour savoir que ce n’est pas toujours le DJ le plus technique qui te fera passer la meilleure soirée. Pire : on a suffisamment de contre-exemples en tête pour savoir qu’un DJ misant sur une playlist full bouyon remportera peut-être plus de suffrages qu’un autre misant sur des choses plus obscures. En tout cas, on s’attendait à ce que ce personnage parfaitement respectable soigne son premier "mix album", d’autant plus que le bougre n’est pas sans avoir vécu une large timeline de choses qui ont secoué l’Angleterre ces trente dernières années. Et puis bon, même si le panorama des sélections mixées a bien changé, on avait gardé l’image d’une Fabric qui faisait dans le less is more et triait sur le volet les gens qu’elle choisissait pour sa série Fabric Presents - comment ne pas évoquer la démonstration de force de Helena Hauff en 2023 ou cet impeccable mix d’Overmono bien meilleur que l'album qui allait suivre.

La réalité sera malheureusement toute autre, et il faudra bien peu de temps pour s’en rendre compte : ici tout n’est que chaos. Chaos dans l’exécution d’un type qui a des platines depuis une heure et demie et qui, fidèle aux préceptes de Bob Sinclar, est persuadé qu’on peut être DJ en cinq minutes. Chaos aussi dans le choix d’une setlist qui essaie de se la jouer actuelle, mais échoue à montrer la pertinence de Skinner sur ses genres de prédilection. Chaos enfin, parce que la dernière chose qu’on avait envie d’entendre entre deux wubwubs mal fagotés, ce sont des inédits mous du gland de The Streets dont tout le monde se fout et qui sabrent encore davantage le peu de dynamique globale d’un patchwork de titres dont on se demandait déjà bien ce qu’ils foutaient accolés l’un à l’autre.

Alors à qui profite le crime ? Par ici, on se dit qu'il ne profite à pas à grand monde. Certainement pas à Mike Skinner qui, avec cette sélection indigente et gênante, a peu de chance de se reconvertir en DJ. Encore moins à la Fabric qui joue un peu de sa réputation sur cette sortie – rappelons qu’ils ont refusé un mix à Justice qui était bien moins honteux que celui qui nous occupe ici. Et surtout, surtout pas au fan de la première heure de The Streets qu’est (ou qu’était) votre serviteur, et qui voit son idole se faire mettre en bière dans une symphonie pompière et à la limite du supportable. Non, personne n’y gagne quoi que ce soit, alors franchement, si on peut vous économiser une heure de votre vie, on se dit que cette vindicte inhabituelle de notre part n'aura pas été vaine.