Escape From The Pigeon Hole
Abdominal
Le hip-hop connaît depuis longtemps ses bastions les plus vivaces : les States nous abreuvent régulièrement de leurs productions marquées par la dualité de ses côtes alors qu’à l’opposé de la carte, les British ne sont pas en reste avec une scène underground foisonnante, surplombée par l’émergence appréciable du dubstep ou autre grime attitude. Mais limiter la culture urbaine à ces quelques points névralgiques ne serait qu’une grossière erreur, et Abdominal pourrait être le premier à vous en dissuader car apparemment à Toronto aussi on sait y faire en matière de grosses tueries vocales.
Rapidement remarqué par le talentueux Dj Format en 1998 grâce à son single détonant « Vinyl Frontier », Abdominal se voit couronné d’honneurs en devenant un des partenaires attitrés du précieux producteur de Southampton, et il n’aura pas fallu plus de cinq collaborations pour que la carrière du emcee décolle littéralement avec une tournée aux côtés de Jurassic 5. Un album plus que prometteur donc.
Et on est heureux de constater que Escape From The Pigeon Hole tient toutes ses promesses, et bien plus même car avec son casting de rêve (Dj Format, Cut Chemist, Dj Fase ou encore Dj Serious), le Québécois n’a plus qu’à poser son flow de maître sur ces quinze titres de haute volée pour se dégager de la masse grouillante des productions actuelles. Et ce flow justement, parlons-en : tout en justesse, assuré et surtout plein d’humour. Grâce à cet armement vocal, Abdominal parvient sans mal à plaire instantanément et on croirait entendre ici la nouvelle découverte des Anglais de Big Dada. Les productions funky donnent de l’envergure à ce premier essai de qualité, à tel point qu’il est difficile de trouver la brèche qui pourrait rendre ce disque bancal. La ceinture abdominale du rappeur semble à l’abri de tous les coups, ce qui lui donnera l’occasion de répliquer avec de véritables petites bombes funk/hip-hop en la présence de « « Breathe Later », « Radio Friendly » ou bien l’énorme « Walk Left /Stand Right ».
On se rend vite compte avec bonheur que le climat de décontraction et la maîtrise permanente qui se dégage de cette galette suffisent à nous faire oublier les hauts lieux, soi-disant indétrônables, du hip-hop mondial. Les flingues, les putes, et les liasses s’effondrent sous la patte de ce petit génie de Toronto et, en compagnie de ces camarades de chantiers, le voilà, après seulement un album, dans une position de force incontestable pour apprécier l’avenir avec sérénité. À écouter d’urgence.