És pregunta
Tarta Relena
Connues pour jouer sur scène avec une amphore reliée à un micro et un processeur d’effets, les chanteuses de Tarta Relena reviennent pour un troisième album entre musique sacrée et exploration électronique. Bien intégrées au sein de la scène expérimentale barcelonaise, on avait repéré Helena Ros Redon et Marta Torrella i Martínez aux chœurs derrière Marina Herlop puis sur leur propre album Fiat Lux, salué notamment par Pitchfork. Ce troisième album, És pregunta [c’est une question], est coproduit avec Juan Luis Batalla Aparicio du groupe de post-rock barcelonais Nero Bambola, dont elles reprennent une mélodie sur un des morceaux.
Après avoir étudié les langues vivantes et mortes de la Méditerranée - à l’université, sur leurs propres albums, mais aussi sur l’album collectif de la TransMegaCobla dirigé par le groupe Za!, une sorte de conte free funk en phénicien ancien - les chanteuses de Tarta Relena chantent cette fois-ci en catalan, en latin, en castillan, en grec ancien et en italien. Bien que les sonorités des langues méditerranéennes et du japonais soient bien différentes, l'addition de la polyphonie rappelle parfois la bande originale de Ghost in the Shell de Kenji Kawai. Tarta Relena flirte même pour la première fois avec le chant flamenco sur « Si veriash a la rana », un morceau pourtant basé sur une chanson traditionnelle turque. Marta et Helena ont étendu leur collectage au-delà du pourtour méditerranéen, s'inspirant de poètes lyriques, de séfarades espagnols, d’un réalisateur indien et de la nature.
Les chansons les plus envoûtantes sont également les plus chelous, en commençant par l’expérimentation syllabique sur « Tamarindo » et son inverse « Odniramat ». Marta et Helena demeurent des fans de Björk avec au moins un morceau hommage par album et cette fois-ci c’est « Galenismos » : une chanson composée en attribuant des sons aux données de température de l'eau collectée par les robots autonomes du programme Argo en Méditerranée et qui reprend les tricks vocaux de la période Medúlla dont notamment les expirations suraiguës servant de beats à la musique.
Sur És pregunta, la composition flirte tellement avec le minimaliste qu’on pourrait reprocher à certains morceaux de se limiter à une seule idée mais la durée moyenne de chacun dépasse rarement les trois minutes. Il y a des morceaux presque uniquement portés par la polyphonie des deux voix, comme « Beata Viscera », un chant en latin du XIIe siècle vantant les entrailles de la Vierge Marie, où les ajouts électroniques sont minimaux. La beauté réside dans la simplicité.