Embrace
Sleepy Sun
Issus de la plus pure tradition psychédélique de San Fransisco, Sleepy Sun est l’archétype d’un style à lui seul, autant par l’allure de ses protagonistes que par le son d’Embrace, premier album du sextet. On frôlerait la caricature s’ils ne jouaient pas aussi bien. Et puisqu’une image vaut mieux qu’un long discours, qu’on se reporte au trailer de l’album (disponible sur le site du groupe) : on peut y voir une performance live de « White Dove », titre phare, orchestrée par une bande de joyeux drilles en chemises à fleurs, suants et hagards, dans la lumière d’un kaléidoscope géant ! Quelques gémissements de guitares erratiques qui finissent par se transformer d’un seul coup en un overdrive compact et lourd et une grosse caisse qui est méthodiquement massacrée dans le fond de la scène : voilà qui promet des concerts épuisants !
Qu’a cela ne tienne, on a déjà entendu ça ! Des rythmes lourds, une basse fuzz omniprésente et des guitares expansives à la frontière entre celles de Black Sabbath et celles de Kyuss… C’est du Black Mountain, clairement, à deux ou trois degrés de reverb près. Une coïncidence ? Pas du tout, puisque c’est Colin Stewart, producteur de ces derniers, qu’on retrouve aux commandes de cet album. Pas de quoi hurler à l’innovation, ce n’est manifestement pas le but recherché par la plaque, à travers laquelle on peut lire en filigrane et en majuscules : Black Angels, Dead Meadow, Earth ou Pink Floyd. De ceux-ci, Embrace hérite des solos de guitare aériens (qui ne font pas de mal au milieu d’un paysage musical déserté par les solistes). Des autres, il hérite de la gravité jupitérienne propre au heavy metal et au stoner rock qui se pose sur la nuque avec la franchise d’une chape de plomb. C’est un peu ce qu’on ressent à l’écoute de « New Age » ou « Red/Black », à l’inverse de « Sleepy Son » et « Golden Artifact » qui parcourent d’avantage le versant halluciné du rock psyché avec incantations et instruments exotiques à la clé. Cartons d’acides non-inclus.
Malgré son allure téléphonée, Embrace frappe fort. Il pose les bases d’une formation très intéressante, qu’on espère voir grandir dans le bon sens, c'est-à-dire celui de la créativité débordante dépassant le simple mimétisme érudit. Sleepy Sun, c’est 23 ans d’âge moyen : tous les espoirs sont permis !