Death Magic
HEALTH
C'est très chaud: le troisième album (hors B.O. de Max Payne 3) de HEALTH a le potentiel polarisant du premier EP de FAUVE ou du dernier album de Booba. Il faut dire que le groupe californien ne ménage pas son public traditionnel et s'engage complètement sur la voie d'une pop-électronique-new-wave-un-peu-goth, bien loin des formats noise rock noise qui l'ont fait connaître. En même temps, ce revirement n'est pas une grosse surprise pour ceux qui suivent un peu ce que le groupe dit à la presse (ils y vantent Depeche Mode et Rihanna) ou pour ceux qui les ont vu récemment en concert. Reste que le morceau "Life" pourrait être le nouveau single de Pet Shop Boys s'ils décidaient d'embrasser des sons plus froids. C'est sûr, c'est étonnant.
En plus de cette transformation radicale - certains parleront sans doute d'abdication pour des formats plus grand public - l'album est loin d'être parfait. Certains titres manquent complètement leur objectif à cause d'une composition hasardeuse - "New Coke" est un bon exemple. Pas simple de s'inventer songwriter avec leur background. Et même si l'album, dans l'ensemble, ne se revendique pas sophistiqué, quelques morceaux démontrent un mauvais goût vraiment douteux ("L.A. Looks" en particulier). Bref, ce disque pourrait se ramasser un 4/10 sans que cela choque trop de monde.
Pourtant, il y a une chose qu'il parvient à réaliser, et c'est faire passer des émotions. Il faut sentir l'ambiance d'une pièce changer quand résonne le "And we both know, love's not in our hearts" sur "Stonefist". Cette ambiance, elle est un mélange de froideur industrielle, d'énergie sexuelle, d'une bonne dose de perversité et d'une pointe de mélancolie. C'est exactement ce qui transpirait du "Relax" de Frankie Goes To Hollywood. C'est un peu ce qu'on aurait aimé voir se développer chez Zola Jesus, et qu'elle n'est plus jamais parvenue à reproduire après ses premiers EP. Difficile de dire d'où cela vient. Peut-être de la très grande cohérence sonore du disque, construit autour d'un tempo lent rythmé par un beat profond. Sans doute également des effets sur la voix, parfaitement en équilibre entre le côté métallique et une certaine fragilité. Et puis, il y a le refus du moindre second degré et la détermination mélodique quand, paradoxalement, il serait bien plus simple pour eux de se concentrer sur l'énergie et le son.
Certes, cette ambiance souffre un peu des imprécisions du dernier tiers de ce Deah Magic. Mais bordel, il n'y aura pas eu d'autre disque en 2015 qui nous aura donné envie d'enfiler du latex (le cuir, c'est has been) pour aller se frotter à d'autres corps dans des caves sombres. L'hédonisme débarassé des soixante-huitards.