Currents
Tame Impala
Il n’est pas forcément évident de réussir sa vie quand on s’appelle Kevin. Disons que c’est moins facile d’être pris au sérieux de façon générale. Mais quand on vient de Perth et qu’on arrive à s’imposer en quelques années comme une icône d’un certain revival psyché, c’est une autre histoire. C’est le cas de Kevin Parker, ce touche-à-tout qui ne dort jamais. Pour le dernier album de Tame Impala, projet solo devenu groupe incontournable, le Parisien d'adoption a probablement écumé les brocantes pour y pécho quelques synthés. Et s'est également rappelé au bon souvenir de ses soirées de jeunesse passées à prendre des drogues en écoutant les Bee Gees.
A mesure que se confirmaient les rumeurs entourant la sortie hyper-médiatisée de Currents (le passage en major a pas mal joué), on a beaucoup entendu dire que le groupe prenait avec ce disque un virage plus électronique, plus pop. Ce n’est pas forcément faux mais c’est en fait la suite logique de ce que Kevin Parker a pu proposer depuis ses débuts. Quel que soit le format ou les artifices, cet amoureux de la pop continue simplement de nous surprendre et d'enfoncer les portes de la perception. Guitares ou claviers, peu importe finalement. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à écouter certaines perles pondues depuis la sortie de Lonerism, ces reprises bien éloignées du registre habituellement privilégié par Tame Impala (eargasm garanti avec celle de Michael Jackson), son travail de production pour le premier album de sa girlfriend Melody’s Echo Chamber et ses featurings pour Mark Ronson qui donnent envie d’arpenter les rues de Vice City au volant d’une Banshee.
Ainsi, malgré les changements opérées, les amoureux de Tame Impala ne vont pas être perdus avec ce disque: les riffs sont là, la voix de Kevin Parker est fragile et assumée, la batterie est toujours dégueulasse et l'ensemble est plongé dans un écho sublime. Les blaireaux qui ont peur que Tame Impala devienne un mauvais groupe de synth pop n’ont donc définitivement rien compris à son charme. Qu’ils arrêtent de nous faire chier et qu'ils retournent écouter Temples. Avec des titres comme « Cause I’m A Man » ou « The Less I Know The Better », le disque mise sur les vielles recettes, en leur apportant néanmoins une légèreté nouvelle rendue possible par ces nappes de synthés qui occupent l'espace. Tu as parfois envie de fixer le plafond et prétendre d’être défoncé. Tu as même le droit de ne pas faire semblant si tu veux, vis ta vie.
Mais soyons clairs: même si l'on apprécie la démarche et l'évolution, on peut cependant être un peu déçu par Currents. Pris dans sa globalité, le disque comporte son lot de longueurs et les guitares ultra saturées nous manquent parfois. Le tout est certes cohérent et très bien ficelé, mais il faut quand même bien avouer qu’on s’emmerde un peu sur « Yes I’m Changing » ou « New Person, Same Old Mistakes ». Mais certainement pas de quoi désavouer le groupe ou nous empêcher de nous déplacer pour voir le Kev' tripoter ses pédales de ses pieds nus.