Cassettera
Ekoplekz
Il paraît que la cassette essaie de faire son retour depuis quelques années - on a un peu de mal à y croire, mais c'est ainsi. Et puis tant que ce comeback sert de prétexte à de bonnes propositions artistiques, on est prêt à le soutenir. Du coup, pour des fêtes de fin d'année dignes de ce nom, Planet Mu a sorti deux albums au format cassette, dont celui d'Ekoplekz qui nous occupe aujourd'hui.
Sa nouvelle sortie, Cassettera, est en réalité constituée de morceaux écrits pendant une longue session qui a eu lieu au milieu de la composition de Bioprodukt, autre album sorti en juin dernier. Comme une excroissance maléfique, les dix morceaux de la nouvelle tape du producteur IDM / ambient sont autant de revers de la médaille, agissant comme un véritable dark side lunaire. Mais la toile de fond est la même: une impression de longue fête dans une tribu qui aurait remplacé les tambours et les flûtes par des synthétiseurs modulaires.
Ekoplekz a toujours aimé travailler des sonorités dansantes, mais s'est toujours gardé d'y associer les structures rythmiques ou l'intensité qui auraient permis d'effectivement se déhancher. C'est d'ailleurs ce qui en fait un producteur si original, et parfois plus proche de la musique expérimentale que de la musique électronique "dansante", à l'image d'un Prurient ou d'un Lee Gamble. Ici, l'Anglais pousse la démarche un peu plus loin, en intégrant des rythmes parfois proches de la house ou de la techno, plus évidents qu'à l'accoutumé. L'ambiance de session lui permettant probablement d'un peu lâcher la bride et tester des choses, il ose ouvrir un peu le filtre de la facilité. Alors c'est vrai, on n'oserait pas le recommander aux fans de Petit Biscuit, mais il faut bien avour que le résultat est positif.
Certes, on n'y verra pas une vraie radicalité par rapport à Bioprodukt mais les sonorités dont on le sait proche depuis plusieurs albums prennent ici une allure sensiblement différente. Là où on pouvait voir dans sa volonté de saturer et filtrer tous ses synthés une démarche presque mystique, ces mêmes sonorités se révèlent dans Cassettera assez proche d'une techno lo-fi. En témoignent le très sale « Mashdown » ou « The Outlook Is Bleak », dans lesquels l'atmosphère pesante et radicale de l'album prend tout son sens, sans que la créativité en prenne un coup. Pour la première fois peut-être, on imagine Ekoplekz se produire dans un club, et rien que pour cela, le changement est profitable.
Ces dernières années, on avait toujours eu affaire à un Ekoplekz très cadré, travaillé, et subtil. Mais dans cette compilation de morceaux qui n'étaient pas censés sortir, on le voit sous un jour nouveau, travaillant son art à la nuit tombée, quand les percussions s'affolent et que les synthétiseurs se débrident.