Buds
Ovlov
Le rap est aujourd’hui le Bitcoin de l’industrie musicale : tout le monde en veut, sa valeur est surestimée et il profite de cet engouement délirant en attendent le retour de bâton. Le rock est lui l’équivalent de l’or : une valeur refuge. Et tandis que le rap se gave, nombreux sont les groupes de rock qui sortent des bons disques dans l’indifférence, en attendant des jours meilleurs pour leur ego et leur compte en banque. Ne soyons pas naïfs : les guitares redeviendront cool pour les ados plus tôt qu’on ne l’imagine - il suffit d’écouter le SOUR d’Olivia Rodrigo pour réaliser qu’aux yeux de la jeunesse le rock est devenu tellement ringard qu’il en redevient digne d’intérêt.
En attendant, les bons albums de rock qui passent sous les radars sont plus nombreux que les références au Général de Gaulle dans un discours de Zemmour. Et un groupe comme Ovlov, actif depuis une dizaine d’années maintenant, incarne bien le triste sort réservé à des formations qui privilégient leurs idéaux à la loi du marché. Car dans une économie plus favorable aux guitares, des labels comme Merge ou Matador seraient certainement tentés de donner sa chance au groupe basé dans le Connecticut : sa musique ne se caractérise pas vraiment par son originalité, mais son utilisation maline de la pédale fuzz, sa capacité à penser son disque comme une grosse montagne russe, et la façon dont il distille son amour du grunge et du shoegaze dans des formats plus pop en font un concurrent sérieux pour aller se faire une belle petite place dans les cœurs des fans de Sonic Youth, Slowdive ou, pour citer un groupe plus proche de nous, des Cloud Nothings.
Enfin, sa concision est peut-être le meilleur argument en faveur de ce qui est déjà le troisième album de la formation américaine : sur un format court (25 minutes pour 8 titres) qui ne choisit pas vraiment son camp entre l’EP et l’album, Ovlov parvient à dire énormément de choses, et le formidable « Eat More » est assez emblématique de cette volonté d’aller à l’essentiel : là où d’autres auraient opté pour un final chaotique baignant dans la distorsion, Buds resserre le propos pour vise encore plus juste. Un titre nerveux, qui utilise sa rage à bon escient, et surtout à l’image d’un disque en total décalage avec son époque, mais qui fait tellement de bien.