Boys and Girls
Alabama Shakes
Il y a peu, on s’attardait sur le cas Michael Kiwanuka, cet artiste anglais placardé un peu trop vite comme le successeur d’un Otis Redding qui aurait un peu trop écouté de folk. Un album très attendu et au final un peu décevant. Aujourd’hui, on prend un peu de temps pour vous parler d’Alabama Shakes, la vraie bonne surprise estampillée soul (mais aussi rock et blues) de ce premier semestre 2012.
Comme le groupe n’est pas encore bien connu, une petite présentation s’impose. On parle ici d’une formation qui, il y a peu encore, était incapable de se dégotter un concert dans son trou perdu de l’Alabama (Athens, à ne pas confondre avec la ville du même nom en Géorgie d’où est originaire R.E.M.) et prenait en quelque sorte sa revanche en se payant un « national television debut » chez Conan O’Brian il y a quelques semaines. On parle également d’un groupe qui a tapé dans l’œil d’un certain Jack White, qui a sorti le premier 7’ du groupe sur son label Third Man Records – en même temps vu la ressemblance vocale entre celle de l’ancien White Stripe et de la chanteuse Britanny Howard, on ne s’étonne pas que le courant soit passé. On parle enfin d’un groupe qui a trouvé refuge chez Rough Trade, une maison qui nous a fait aimer des albums d’Emiliana Torrini, de Pantha du Prince ou d’Edward Sharpe and the Magnetic Zeros. Des gens ouverts au nez particulièrement creux donc. Et dont le dernier pari en date s’avère payant sur toute la ligne
En effet, pour ce premier album, le quatuor américain ne fait ni dans le détail, ni dans la complexité. Par contre, niveau sincérité et efficacité, le chaland n’aura vraiment pas à se plaindre. Couvrant un spectre qui oscille entre le blues un peu crasseux et la soul qui vous bouffe les tripes, Alabama Shakes joue la carte de la prise directe avec les émotions de son auditoire. Rien que l’imparable single « Hold On » placé en ouverture de Boys & Girls suffira à vous faire une petite idée de la philosophie prônée par le groupe, mais aussi des qualités d’une Brittany Howard qui éclabousse ce premier album de son talent d’incantatrice à la voix rocailleuse, aussi épatante d’aisance lorsqu’il s’agit de nous arracher une petite larmes sur de déchirantes ballades (« Boys & Girls ») que dans l’exercice de la prêche virevoltante (« Be Mine »). Certes, Boys & Girls a parfois des airs d’exercice de style emprisonné dans le passé, mais ces onze titres recèlent suffisamment de qualités pour qu’on n’accole pas au groupe le substantif de révélation.