B.O.A.T.S II #Me Time
2 Chainz
Il est tellement fatiguant de le voir partout que 2 Chainz est aujourd’hui passé dans une sorte d’inconscient collectif. La présence – on devrait plutôt parler d’omniprésence, quoique ce soit encore trop faible à ce niveau - de 2 Chainz sur les ondes est tout simplement outrageuse: on a en fait l'impression que pas un seul titre de rap sur YouTube ou Vevo ne sort sans un traditionel featuring de Tauheed Epps. Forcément, 2 Chainz est rapidement devenu le rappeur iconique du rap qui se voit plusieurs millions de fois (parfois plusieurs dizaines de millions de fois) à chaque sortie. Un gigantisme qui cartonne sur Based On A T.R.U. Strory, deuxième album de la machine à faire de la maille avec classe.
Pourtant il ne faudrait pas oublier que personne mieux que 2 Chainz ne cristallise mieux tout le succès que peut avoir un emcee moyen dans la grande sphère du hip-hop de nouveaux riches. Qu’on ne déforme pas nos propos: 2 Chainz n’est jamais mauvais, au mieux il se contente d’être dans la moyenne. Le fameux average good, le moyen tirant vers le haut. Mais qui suffit aujourd’hui pour se faire un nom au travers de mixtapes téléchargées à foison, d’abord, puis avec des albums au succès plus ou moins confirmé. L’enfer du swag, le vrai, celui de l’attitude au-dessus de tout et de la présence constante. Le mainstream dans toute sa splendeur, celui qui se croise et se décroise au fil des collaborations, des annonces et des contre-annonces, des guerres de clans et des changements de label. Si on voulait caricaturer, on se mettrait à théoriser sur la place que garde le hip-hop éternel dans cette foire à l’écartèlement. On ne le fera pas, parce que c’est là-même que ça en devient génial.
C’est véritablement cette puanteur luxueuse qui rend le hip-hop en mixtape (et les albums qui en sont les conséquences plus ou moins inutiles) génial, une sorte de format réinventé pour l’écoute arrivée à un sommet conceptualisé de jugement. Dans un monde où le matériau n’a jamais été aussi foisonnant, seuls les noms les plus ronflants survivent et seules les premières écoutes suffisent. C’est ça la force de 2 Chainz (même si l’immédiateté de son succès commence doucement à débander): malgré tous se défauts – et il en est rempli ce disque, à commencer par la linéarité de sa diction dans les mediums – 2 Chainz s’écoute seulement par un seul bout de la lorgnette, il punche, pue le fric et déroule sans trop de passions. Mais ça suffira. Rajoutez à ce constat quelques tubes discrets (« Where U Been ? », « Netflix », « U Da Realest », « Mainstream Ratchet »), quelques figurants au bon goût de caricature (Lil Wayne, Drake, T-Pain, Wiz Khalifa, Pharell,…) et vous avez le package parfait du disque cool mais terriblement fainéant. Une synthèse de l'entertainment où l’excellent côtoie souvent le banal dans une une patine poisseuse et délicieuse dont s’enduit le hip-hop ricain jour après jour depuis quinze ans. En même temps, quand on sait que 2 Chainz a été un jour le poulain de Ludacris, tout prend un sens.