Bluffer’s Guide To The Flight Deck
Flotation Toy Warning
Depuis 2002 et les sorties, coup sur coup, des EPs I Remember Trees et The Special Tape, on se savait en droit d’attendre beaucoup des anglais de Flotation Toy Warning. Il y avait sur ces deux maxis suffisamment de d’indices du talent de ces improbables cousins éloignés des Flaming Lips et de Air pour mettre en alerte tous les amateurs de pop majestueuse et aérienne. Et si le quintet a pris son temps pour peaufiner son premier album, l’attente n’aura pas été vaine car il dépasse, de loin, toutes nos espérances. Reprenant les choses où elles s’étaient arrêtées deux ans auparavant, Bluffer’s Guide To The Flight Deck est autant un premier résumé qu’un achèvement en soi de la musique du quintet, puisqu’il reprend l’intégralité du premier EP et l’essentiel "Popstar Researching Oblivion" du second, tout en parvenant à leur redonner une seconde vie au milieu de nouvelles compositions.
Si le groupe semble préférer le format long pour ses compositions (la moitié des titres dépasse les 6 minutes), le disque est cerné par deux chansons pop imparables, "Happy 13" et "How The Plains Left Me Flat", titres où les comparaisons avec la scène américaine (Flaming Lips, Grandaddy, Mercury Rev ou même Sparklehorse) semblent les plus flagrantes. Pourtant, il y a autre chose dans l’univers des anglais, quelque chose de plus féérique dans cette utilisation des voix, des claviers et des cuivres. Quelque chose qui pourrait faire penser au Pink Floyd de Meddle, par exemple. Quelque chose, en tout cas, de typiquement britannique et qui donne à ce Bluffer’s Guide To The Flight Deck un côté intemporel et presque classique. Ce qui peut sembler assez paradoxal à l’écoute de "Donald Pleasance", complainte de plus de neuf minutes qui ne ressemble guère a quoique ce soit de paru depuis plusieurs décennies.
L’extension du monde sonore du quintet via les paroles de Paul Carter est l’un des charmes les plus étranges de ce disque. Volontairement obscurs, les textes semblent traiter du voyage initiatique autant que de la recherche d’identité, et se déclinent comme une illustration d’une hypothétique expédition polaire commencée au XIXème Siècle, toujours en quête d’homologation, et dont les membres du groupe seraient les derniers témoins (voir l’hallucinante biographie sur le site officiel). Mais au fond, peu importe ce qui se cache derrière un morceau aussi envoûtant que "Even Fantastica" : Flotation Toy Warning a sorti un disque inclassable et céleste, et c'est à peu près tout ce que l'on a besoin de savoir.