Balloonerism

Mac Miller

Warner – 2025
par Aurélien, le 12 février 2025
5

Malcolm McCormick n’est plus, mais la légende de Mac Miller, elle, est plus vivante que jamais. Sept ans après son passage de vie à trépas, son œuvre riche en angles morts n’a jamais été autant mise à l’honneur : son projet jazz de 2012 (sous le nom de Larry Lovestein), sa formidable mixtape Faces ou son émouvant passage au Tiny Desk de NPR ont tous bénéficié d’une sortie post mortem. Peu surprenant donc que sa carrière soit reconsidérée, y compris par les moins fans du bonhomme : en appréhendant enfin son œuvre dans sa globalité, on se dit qu’en 2025 il n’y a plus d’excuses pour trouver une facette de Mac Miller qui saura nous parler. 

En fait, faire ce point de rappel nous permet surtout de poser la question suivante : qu’attendre des pelures d’un artiste dont le vrai talent était de garder le nectar pour ses albums ? C’était déjà une question que l’on se posait à l’époque de Circles, supposé reprendre l’histoire là où Swimming l’avait laissée. Terminé par son ami Jon Brion, ce joli monochrome était à l'opposé des albums bigarrés de celui qui n’a jamais réussi à produire un disque définitif de son vivant, trop occupé à ce que sa musique embrasse le spectre le plus large possible. Quid de Balloonerism donc ? Il épouse une trajectoire différente, dans le sens où il s’agit bien cette fois d’un disque écrit du vivant du rouquin. Enregistrés à la même période que Faces, ces quatorze inédits se refilaient sous le manteau bien avant que la Warner ne se décide à les sortir officiellement.

Produit exclusivement par Mac Miller à une époque où il est en roue libre, Balloonerism partage avec la mixtape Faces ce décalage entre une production lumineuse et des textes qui flirtent avec la Grande Faucheuse. Pour autant, si certains titres sont d’une qualité très correcte, parmi lesquels le très Pharrell-ien "5 Dollar Pony Rides" ou le très beau "Funny Papers", d’autres justifient à merveille leur statut de chute de studio. Il faut se faire bousculer par l'horrible "DJ’s Chord Organ" en tout début de disque ou ce titre de son alias Delusional Thomas qui ne va absolument nulle part pour comprendre que tout n’est pas rose non plus sur ce second disque posthume, voire que cette collection d’inédits commence à sentir le fond du baril.

Balloonerism n’est pourtant pas un mauvais disque : comme nombre de témoignages posthumes, il nous éclaire d'abord sur le processus créatif de Mac Miller. Beaucoup de ce qu’on entend ici transpire l’inachevé, ou fonctionne comme une note d'intention, et c'est probablement la raison pour laquelle Balloonerism s'est perdu en route ces dix dernières années. À dire vrai, ces inédits n’apportent aucune indication sur la trajectoire qu'aurait pu emprunter sa carrière, et seraient mieux considérés s'ils étaient restés à l’état de fuite de studio sur Internet, comme un ultime cadeau aux fans du plus beau clown triste du rap US. Reste alors ce plaisir morbide de l’entendre à nouveau, mais franchement c'est loin, très loin de faire de Balloonerism un disque incontournable dans l'œuvre de Mac Miller, dont le génie manque plus que jamais en ces temps bizarres.