As If We Were Dancing
Yuko
Il était vraiment très chouette, ce premier disque de Yuko. Mais soyons honnêtes: le groupe était débutant, flamand et ne donnait pas vraiment dans le genre de sucreries qui attirent hipsters et programmateurs comme des mouches. Chances de percer de ce côté-ci du rideau de chicon? Quasi nulles malheureusement. Et on ne vous parle même pas de la France. Pour ceux qui débarqueraient, le truc à Yuko, c'était plutôt un folktronica poli et joli dont l'unique ambition semblait être de faire aussi bien que les modèles Tunng ou Efterklang. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que la mission était remplie sur For Times When Ears Are Sore, avec les félicitations du jury en prime.
Pour ce nouvel album par contre, on sent clairement le groupe à l'attaque des ondes et des blogs prescripteurs de bon goût, en ce compris celui-ci bien sûr. En effet, là où le précédent effort du groupe gantois sentait bon les bidouillages malins, le post-rock intello et le folk champêtre, As If We Were Dancing dénote par sa volonté affichée d'explorer le côté poppy de la force, pas bien obscur celui-là, tout en n'abandonnant pas les chevaux de bataille d'antan. Et pour le coup, c'est plutôt des noms comme The Whitest Boy Alive ou Uzi & Ari qui nous viennent à l'esprit lorsqu'il s'agit de mettre la puce à l'oreille du lecteur frileux. Mais plus que des noms alléchants jetés en pâture pour titiller votre intérêt, on se réjouit du fait que les Flamands aient plus d'arguments à faire valoir sur ce disque que dans leur dossier de presse. En effet, As If We Were Dancing est un disque complètement réussi auquel on promettrait certainement un avenir un peu plus brillant si ces géniteurs étaient Anglais ou Suédois.
Du propre aveu du songwriter Kristof Deneijs, la conception d'As If We Were Dancing a été laborieuse. Pourtant, dès la première écoute, ce qui ressort de ces dix nouvelles compositions, c'est un sentiment agréable de sérénité et de fluidité, dont le plus bel exemple est à n'en point douter le tubesque "Dolly Parton", premier single évident tiré du disque et que ne renierait pas un certain Erlend Øye. D'ailleurs, c'est toute la première moitié d'As If We Were Dancing qui subit le même traitement et nous aère les neurones avec une déconcertante aisance. De quoi nous mettre dans de bonnes conditions pour une seconde partie de galette qui se veut plus aventureuse et broussailleuse, sans pour autant jouer les rabat-joies. Mais cette gradation dans la complexité est quoiqu'il en soit intéressante et démontre toute l'étendue du talent d'un groupe à l'aise sur de nombreux tableaux.
As If We Were Dancing est donc un disque de saison qui mérite qu'on s'y attarde, et pas qu'un peu. Vous l'aurez également compris, les éléments ne jouent pas vraiment en la faveur d'un groupe qu'on risque fort de retrouver dans tous les mêmes festivals flamands et hollandais dans les mois à venir. La version "in het Nederlands" de Malibu Stacy ou The Tellers, pour prendre des (mauvais) exemples qui parleront à tout le monde. Vous l'aurez compris, chers lecteurs, la révolution commence ici.