Antichambre
Naast
Je dois bien avouer qu’en ce qui me concerne, l’affaire Naast était réglée depuis le passage plutôt remarqué – mais pas pour les bonnes raisons – de son leader Gustave Rambali dans l’émission de Frédéric Taddeï. Ce soir-là, le jeune homme, à coup de réflexions d’une rare vacuité, s’érigeait en quelques minutes à peine en véritable Jean-Claude Van Damme de la scène rock hexagonale. S’en était suivi quelques semaines plus tard le désormais célèbre « incident de la fourchette » qui avait vu le même Gustave planter une fourchette dans l’œil d’un adolescent un tantinet trop frondeur au terme d’un concert plutôt houleux à Bordeaux.
Notamment propulsés par Rock’n’Folk et pas mal d’internautes à la tête de cette nouvelle scène rock parisienne qui ne semble passionner que la capitale, le groupe est aujourd’hui devenu (avec son penchant féminin les Plastiscines) le punching ball préféré de nombreuses personnes qui voient en eux une bande de bourgeois pistonnés qui pensent plus à leur garde-robe qu’à leurs compos. Il suffit d’ailleurs de quelques clicks pour remarquer qu’il est bien plus facile de trouver des informations sur les frasques du groupe et de son leader que sur Antichambre, le premier album de Naast. Justement, qu’en est-il de ce disque ? Au vu de ce que l’on peut lire çà et là sur le disque, la barre n’allait forcément pas être placée extrêmement haut. Pourtant, à l’écoute du single « Mauvais Garçon », la petite bombe de deux minutes qui ouvre l’album, on se dit qu’il faudra peut-être revoir son jugement. Le groupe joue dans l’urgence la plus complète et enfile en à peine 25 minutes une belle chiée de titres entêtants. Emmenées par un Gustave Rambali tout en provocation et relevées par un orgue qui vous fera rapidement oublier l’absence de basse, les compositions de Naast mélangent candeur et arrogance pour un résultat des plus probants.
Il est évident que le quatuor a chargé l’intégrale des Clash et de The Jam sur son i-Pod, a la plus haute estime pour Pete Doherty et que cela suffit donc amplement pour faire de lui un énième groupe profitant du revival garage pour draguer les minettes du Gibus le samedi soir. Mais en ayant notamment fait le pari – réussi sur Antichambre – de chanter en français, nos jeunes amis parviennent à se démarquer quelque peu d’une cour de recré surpeuplée qui ne demande qu'à suivre la route empruntée par Naast.
Finalement, à l’image de nombreux groupes anglais, les Naast commencent à ressentir les effets pervers d’un medium qui leur a permis d’accéder à la célébrité en quelques coups de souris mais qui demande déjà des comptes à des gamins (spéciale dédicace au duvet naissant de Clod Naast) qui ont encore un peu de mal à gérer le succès – je me demande d’ailleurs bien ce que j’aurais pu raconter comme conneries à Taddeï à 17 ans… Certes, il y a encore du pain sur la planche avant que le groupe puisse talonner ses modèles et Manœuvre ou Eudeline y sont peut-être allés un peu fort en superlatifs, mais les Naast font leur boulot avec suffisamment de gouaille et de bonne volonté pour qu’on ne puisse pas parier au moins quelques kopecks sur eux. Aussi, plutôt que d’écouter Yann Barthes ou la blogosphère se répandre en fiel sur le groupe, commencez d’abord par écouter des titres comme « Cœur de glace », « Je te cherche » ou « Tu te trompes ». Il est bien possible que, comme moi, vous soyez agréablement surpris…